Février – Patience, Consolation
Mois de Février
« Patience et Consolation »
Guillaume de Saint-Thierry
« Que le Dieu de la patience et de la consolation vous accorde de savoir vous goûter les uns les autres à l’exemple du Christ Jésus, afin que d’un même cœur et d’une même bouche vous glorifiiez le Dieu et Père de Notre Seigneur Jésus-Christ”.
De même que Jésus est notre salut parce qu’il donne le salut, notre refuge parce que nous nous réfugions en lui, ainsi est-il le Dieu de la patience et de la consolation, car c’est par lui que nous sommes patients et nous n’attendons de consolation que de lui. Car ce n’est pas des Écritures que nous attendons la patience et la consolation, bien qu’elles nous viennent parfois par les Écritures. Et nous ne recevons pas seulement de lui la patience, mais comme le dit le Prophète : il est lui-même notre patience, il est lui-même notre consolation, lui qui ne peut consoler celui qui l’aime que par lui-même. Quand console-t-il celui qui l’aime, sinon lorsqu’il lui donne de le goûter ?
Lors donc que nous le goûtons lui-même chez les uns et les autres, quoi de meilleur et de plus doux ? N’est-ce pas cela habiter en frères tous ensemble? C’est conforme à l’enseignement de Jésus-Christ qui a dit : “Voici mon commandement, que vous vous aimiez les uns les autres”. Et celui-ci, transmettant aux rameaux greffés la sève de la bonne racine, ajoute : “Comme je vous ai aimés”. Car loin des disciples du Christ un amour charnel et tout amour qui ne tend pas vers Lui !
“Aussi, continue Paul, accueillez-vous les uns pour les autres, comme le Christ vous a accueillis pour la gloire de Dieu”. Car nous ne nous aimons pas les uns les autres si nous ne nous accueillons pas les uns les autres. Nous nous accueillons les uns les autres lorsque, voyant notre frère dans le besoin, nous ne lui fermons pas notre cœur, mais nous l’accueillons dans le sein de la charité. Nous nous accueillons les uns les autres lorsque le juif ne condamne pas le païen, ni le païen le juif, et lorsque nous devenons un seul corps et un seul esprit en l’honneur de Dieu, comme le Christ lui-même nous a accueillis, ne repoussant personne, ne rejetant personne en raison de sa race.
C’est pourquoi l’Apôtre se dit serviteur des circoncis, c’est-à-dire des Juifs. Mais les nations glorifient Dieu pour sa miséricorde, selon qu’il est écrit : “C’est pourquoi je te louerai parmi les nations et je chanterai à ton nom”. Par moi, dit le Fils à son Père, les nations te loueront et tu feras connaître plus largement ton nom par leurs bonnes mœurs : ce témoignage est une louange.
Or ce qu’il dit : “Je chanterai”, c’est le cantique nouveau que lui-même chante en nous, que nous chantons par sa grâce ; Paul le dit ailleurs : “Chantant au Seigneur dans vos cœurs”.
Car au-dedans de nous, c’est une joie quand la voix de l’amour chante et qu’elle est entendue par celui que nous louons par sa propre voix. C’est en effet un chant que d’aimer gratuitement, de tout son cœur, de toute son âme et de toute sa force.
Commentaire sur l’épître aux Romains, VII, PL 180, col 686-688
Guillaume de Saint-Thierry (1085-1148) Né à Liège vers 1085, Guillaume entre au monastère bénédictin de Saint-Thierry, près de Reims, après avoir fait de solides études. Il devient abbé de Saint-Thierry vers 1121. Il avait fait la connaissance de saint Bernard et désirait devenir cistercien. En 1135, il entre à l’abbaye cistercienne de Signy dans les Ardennes où il reste jusqu’à sa mort en 1148.