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Septembre – Ps 90 – 17

Mois de septembre

Ecoutons Saint Bernard – Sermon 17 sur le psaume 90

DIX-SEPTIÈME SERMON. « Je le comblerai de jours et d’années, et je lui ferai part du salut que je destine à mes saints (Psal. XC, 16).»

sept2022-4001. Ce verset, mes frères, convient parfaitement au saint temps où nous sommes. Sur le point de célébrer la fête de la résurrection de Notre-Seigneur, nous attendons la promesse qui nous est faite de participer à cette résurrection si glorieuse : il nous invite en qualité de membres de Jésus-Christ, à célébrer avec solennité la mémoire de ce qui est arrivé à notre chef, en considérant que nous devons un jour avoir part à la même gloire. Que ce psaume finit bien, puisqu’il promet à ceux qui le chantent une fin si heureuse ! Ce verset termine le psaume d’une manière qui doit nous remplir de joie, puisqu’il nous promet de nous combler de tous les biens. « Je le comblerai de jours et d’années : et je lui ferai part du salut que je destine à mes saints (I Tim. IV, 8). » Je vous ai dit bien souvent, mes frères, que la piété, selon la doctrine de Saint-Paul, a les promesses de la vie présente aussi bien que de la vie future. C’est pourquoi cet apôtre dit encore : « Vous verrez dès maintenant le fruit de votre fidélité, en obtenant la sanctification de vos âmes et, pour l’avenir, vous obtiendrez la vie éternelle. » Voilà ce que signifient cette plénitude et cette longueur de jours et d’années qui nous sont promises dans ce verset. Qu’y a-t-il, en effet, de plus long que ce qui est éternel ? Qu’y a-t-il de plus long que ce qui ne doit jamais finir  ? C’est une heureuse fin que la vie éternelle ? C’est une heureuse fin que celle qui ne doit jamais avoir de fin ? Il n’y a que ce qui est bien qui soit une bonne fin. Travaillons donc de tout notre cœur à notre sanctification, puisque c’est en elle seulement que consiste le bien, et qu’elle doit être couronnée par une vie qui ne doit jamais finir. Ne pensons qu’à obtenir cette paix du cœur et cette sainteté, sans laquelle personne ne verra Dieu. Le Seigneur dit donc : « Je le comblerai de jours et d’années, et je lui ferai part du salut que je destine à mes saints (Hebr. XII, 14). » C’est une promesse de la droite de Dieu. C’est un don de cette droite qu’un saint souhaitait jadis que Dieu lui tendit, quand il disait : « Vous tendrez, Seigneur, votre droite à l’œuvre de vos mains (Job XIV, 15). » C’est cette droite qui nous doit combler d’éternelles délices. Voilà ce qu’il a désiré et obtenu celui dont le Psalmiste a dit : « Il vous a demandé la vie, et vous lui avez accordé une longueur de jours pour un siècle et pour les siècles des siècles (Psal. XX, 5). » Le Sage s’explique encore plus clairement lorsqu’il dit : « Les richesses et la gloire sont dans sa main gauche, et la longueur des jours est dans sa main droite (Prov. III, 16). » Qui est l’homme qui veut véritablement la vie et qui souhaite de voir d’heureux jours ? Or, la vie présente est plutôt une mort qu’une vie, ou du moins ce n’est pas une vie simplement, mais une vie mortelle qu’on doit l’appeler. Lorsque nous voyons qu’un homme est sur le point de mourir, nous disons avec raison : Cet homme se meurt. Ne faisons-nous autre chose dès que nous commençons de vivre, que de nous approcher à chaque moment de la mort, et de mourir ? Les jours de cette vie sont courts et mauvais, dit le Patriarche (Gen. XLVII).» On ne vit véritablement que lorsqu’on a une vie vivante et vitale. Les jours dont on jouit ne sont heureux que lorsqu’on est assuré que leur durée est sans fin. Rendons grâces de tout notre cœur à celui dont la puissance et la bonté ont disposé toutes choses : les jours où nous n’avons que des peines à souffrir doivent finir en fort peu de temps ; au lieu que les jours où nous ne devons trouver que du repos et de la félicité, doivent durer éternellement.

2. « Je le comblerai de jours et d’années. » Le Seigneur explique dans ce verset la promesse qu’il a faite dans le précédent en disant: « Je le glorifierai. » Qui est-ce qui ne se contentera pas d’être glorifié, par celui dont les œuvres sont parfaites ? Celui dont la grandeur est sans limites, peut-il glorifier autrement que sans limites. La gloire qui procède de la gloire immense de Dieu a quelque chose de la grandeur et de l’immensité de son principe. Aussi est-ce avec raison que saint-Pierre dit que « la glorification de Notre-Seigneur sur le Thabor procédait d’une gloire magnifique. (II Petr. I, 17). » Elle est magnifique, en effet, et se communique à nous d’une manière magnifique, avec une durée éternelle, une variété infinie, et une plénitude sans mesure. La gloire de cette vie est trompeuse. Son éclat est vain, et les jours de l’homme sur la terre n’ont qu’une durée extrêmement courte ; aussi cette vie ne sera-t-elle jamais l’objet des désirs du sage, qui dira toujours du fond de son cœur à celui qui en sonde les replis «Seigneur, vous savez que je n’ai jamais désiré les jours de l’homme (Jérem. XVIII, 16). » C’est peu, non-seulement je ne désire pas ce que l’homme désire, mais je ne veux même point le recevoir, car je sais qui est celui qui a dit : « Je ne reçois point ma gloire des hommes (Joan. V,. 41). » Combien donc sommes-nous misérables de chercher la gloire que les hommes se donnent les uns aux autres, et de ne point chercher celle qui ne vient que de Dieu ? Car il n’y a que celle-ci qui soit longue et abondante. Les jours de l’homme sont courts ; et ces jours fleuriront et passeront ainsi que la fleur des champs, comme dit l’Ecriture : « La tige s’est séchée, et la fleur qu’elle soutenait s’est aussi fanée mais la parole du Seigneur demeure éternellement (Isa. XI., 7). » C’est le vrai jour que celui qui ne doit point finir. C’est dans ce jour seulement que se rencontre l’éternelle vérité, l’éternité véritable, l’éternité éternelle, qui seule est vraiment capable de remplir tous nos désirs. Comment, en effet, la gloire qui est trompeuse et vaine pourrait-elle y réussir ? Elle est si complètement vide que nous sommes obligés de reconnaître qu’elle nous met dans l’indigence et nous vide, plutôt qu’elle ne nous remplit. Aussi en attendant, mieux vaut pour nous être abaissés que d’être élevés, d’être dans la peine plutôt que dans les plaisirs, puisque peines et plaisirs doivent bientôt passer, avec cette différence pourtant, que les unes ne doivent nous produire que des supplices, et les autres que des couronnes.

3. Certainement l’affliction est bonne puisque c’est par elle que Dieu nous conduit à la gloire, selon ces paroles : « Je suis avec lui dans l’affliction : je le délivrerai et le remplirai de gloire. » Rendons grâces au Père des miséricordes, qui est avec nous dans l’affliction, et nous console dans toutes les peines, qui nous arrivent. Car il nous est nécessaire, comme j’ai dit, d’être dans les souffrances qui se changent en gloire, et dans la tristesse qui se change en joie, mais en une joie qui ne doit jamais finir, et ne peut jamais nous être ravie par qui que ce soit, en une joie, dis-je, abondante, pleine et parfaite. Il est bon d’être dans la peine, puisque c’est par elle que nous devons accueillir la couronne de la gloire. Ne méprisons pas les souffrances, mes frères, c’est une semence bien modeste, mais il doit en sortir beaucoup de fruit. C’est une semence peut-être peu agréable au goût, à cause de son amertume, c’est peut-être le grain de sénevé, mais ne considérons pas le dehors et l’apparence, voyons en les vertus cachées. Souvenons-nous que les choses qui se voient sont temporelles, et que celles qu’on ne voit point sont éternelles. (II Cor. IV, 18.) Goûtons, dans ces maux, que nous avons à souffrir, les prémices de la gloire qui s’y trouvent comme en germe. Faisons consister notre gloire clans l’espérance de participer à la gloire de notre grand Dieu : ce n’est pas encore assez, mettons-la dans toutes les afflictions de cette vie, puisqu’elles sont pour nous une raison d’espérer que Dieu nous donnera de glorieuses couronnes. Peut-être est-ce ce que l’Apôtre a voulu nous apprendre, lorsqu’après avoir dit : « Nous mettons notre gloire dans les afflictions : il ajoute aussitôt : Parce que l’affliction produit la patience , et que la patience est une épreuve qui produit l’espérance (Rom. V, 14). ». Il est manifeste par ces paroles, que l’Apôtre, après avoir dit que nous devons mettre notre gloire dans l’espérance, a ajouté que « nous devons aussi mettre notre gloire dans les afflictions, » non pour dire quelque chose de différent, mais pour s’expliquer davantage, et nous faire mieux entrer dans sa pensée. Car il ne propose qu’une même gloire dans ces deux expressions, et il joint seulement les afflictions à l’espérance, pour montrer sur quoi l’espérance de la gloire doit être fondée. C’est, en effet, dans l’affliction qu’on doit trouver l’espérance de la gloire ; que dis-je ? c’est dans l’affliction même que la gloire se trouve. Et de même que l’espérance du fruit est dans la semence, le fruit de même y est aussi contenu. C’est en ce sens qu’il est dit que dès maintenant le royaume de Dieu est en nous , que nous possédons un trésor d’un prix inestimable dans des vaisseaux de terre, dans un champ de très-petite valeur. C’est qu’en effet ce royaume et ce trésor sont véritablement en nous, mais ils y sont cachés. Heureux celui qui les trouve ! Or, quel est celui-là ? Sinon celui qui considère plutôt la récolte que la semence ? L’œil de la foi trouve ce trésor parce qu’il ne juge pas des choses selon les apparences, mais qu’il voit les choses qui ne peuvent paraître à nos sens, et regarde ce qui ne saurait se voir des yeux du corps, comme il est évident que l’Apôtre avait trouvé ce trésor puisqu’il souhaitait de le faire trouver à tous les autres, quand il disait : « Les peines si courtes et si légères que nous souffrons maintenant, produisent en nous le poids d’une gloire éternelle qui surpasse toute mesure (II Cor. IV, 17) » Il ne dit pas : Les afflictions seront couronnées, mais il dit : elles produisent en nous, dès maintenant, le poids d’une gloire éternelle. Cette gloire, mes frères, ne parait point. Elle est cachée en nous dans l’affliction, et ce qu’elle a d’éternel est dérobé à nos yeux par ce voile d’un moment ; ce poids, cette valeur sans mesure, est contenue dans une chose de peu d’importance, et de mince valeur. Aussi hâtons-nous, pendant que nous sommes sur la terre, d’acheter ce champ, et le trésor qui y est caché. Estimons-nous bienheureux lorsque nous sommes dans les afflictions, et disons du fond du cœur : « Il vaut mieux aller dans une maison de deuil qu’en une maison de festin (Eccli. VIII, 3). »

4. « Je suis avec lui dans l’affliction, dit le Seigneur. » Je ne chercherai donc pas autre chose que l’affliction. Il m’est bon de m’attacher à Dieu : et de m’y attacher de telle sorte, que je mette en lui toute mon espérance puisqu’il a dit : « Je le délivrerai de ses peines et le glorifierai (Psal. LXXII, 28). » Je suis avec lui dans l’affliction, et mes délices sont d’être avec les enfants des hommes (Cor. VIII, 31). » Voilà bien l’Emmanuel, le Dieu avec nous. « Je vous salue, pleine de grâce, dit l’Ange à Marie : le Seigneur est avec vous (Luc. I , 28). » Il est avec nous dans la plénitude de la grâce, et nous serons avec lui dans la plénitude de la gloire. Il est descendu sur la terre pour être près de ceux dont le cœur est affligé, et pour être avec nous dans les épreuves de cette vie. Mais viendra un temps, comme, dit l’Apôtre, où nous serons transportés par les nuées, pour aller au devant de Jésus-Christ ; et alors nous serons pour toujours avec Notre Seigneur, si toutefois nous travaillons à l’avoir toujours avec nous, afin que celui qui doit nous établir dans notre éternelle patrie, soit notre compagnon, ou plutôt, que celui qui doit être lui-même notre patrie, soit aussi lui-même notre voie. Seigneur, il m’est donc beaucoup plus avantageux de souffrir, pourvu que vous soyez toujours avec moi, que de régner sans vous, que d’être dans les plus grandes réjouissances sans vous, que de jouir même de la gloire, séparé de vous. Oui, Seigneur, il est bien meilleur pour moi de vous embrasser dans l’affliction; de vous avoir présent dans le creuset de l’épreuve, que d’être sans vous dans le ciel. Car qu’est-ce que je souhaite dans le ciel, et que désiré-je de vous, sur la terre, sinon vous-même ? Si la fournaise éprouve l’or, la tentation éprouve les justes. C’est dans ces rencontres, oui c’est là, Seigneur, que vous êtes avec eux (Eccli. XXVII, 6), que vous demeurez au milieu d’eux, c’est lorsqu’ils sont assemblés en votre nom, comme vous avez autrefois daigné assister les trois enfants qui furent jetés dans la fournaise de Babylone, d’une présence si visible, que vous contraignîtes un roi infidèle de s’écrier, « qu’il voyait dans les flammes une quatrième personne qui était semblable à un fils de Dieu (Dan. III, 92). » Pourquoi tremblons-nous : pourquoi nous arrêtons-nous pourquoi fuyons-nous à la vue de la fournaise des afflictions? Il est vrai que le feu redouble son ardeur; mais le Seigneur est avec nous dans nos souffrances, et, si Dieu est avec, nous, qui sera contre nous  ? Si, Dieu nous arrache des mains de nos ennemis, qui est-ce qui pourra nous ravir de ses mains toutes puissantes ! Qui est-ce qui peut nous arracher d’entre ses mains ? Enfin, si c’est lui qui nous glorifie, qui est-ce qui pourra nous jeter dans l’ignominie ? S’il nous établit dans la gloire, qui pourra nous humilier ?

5. Mais écoutez quelle gloire Dieu doit nous donner. «Je le comblerai, dit-il, de jours et d’années. » Et d’abord s’il parle de jours au pluriel, c’est pour nous marquer non pas une vicissitude, mais un grand nombre de jours. Il ne faut pas se figurer l’éternité comme une succession de jours, c’est ce qui fait dire au Prophète : un seul jour dans vos tabernacles, Seigneur, vaut mieux que mille autres jours (Psal. LXXXIII, 11). Nous lisons que des saints et des hommes parfaits sont sortis de cette vie pleins de jours, c’est-à-dire, je pense, remplis de vertus, et de grâces, car les saints reçoivent de jour en jour, non de leur propre esprit, mais de l’esprit de Dieu même cet accroissement et cette plénitude de vertu et de grâces qui les transforme, et qui les rend semblables à lui, et les fait monter de clarté en clarté. Si donc la grâce est appelée un jour et une lumière, si même l’éclat qui vient de l’homme, et si cette gloire sans fondement et sans solidité que nous cherchons à recevoir les uns des autres, est, comme j’ai dit ailleurs, le jour de l’homme, combien la plénitude de la véritable gloire mérite-t-elle plutôt d’être appelée un vrai jour et un plein midi ? Et si nous pouvons regarder comme plusieurs jours de la vie de l’âme, les diverses grâces qu’elle reçoit, comment ne pourrions-nous pas aussi regarder, comme un grand nombre de jours la gloire dans laquelle il jouit de tant de biens ? Mais écoutez comment le Prophète a voulu parler d’un grand nombre de jours sans vicissitude, par ces paroles, il dit en effet : «La lumière de la lune sera comme la lumière du soleil : et la lumière du soleil sera elle-même comme la lumière de sept jours (Is. XXX, 16).» Je pense que c’était pendant les jours de cette éternelle vie, que le Roi fidèle souhaitait de chanter ses cantiques dans la maison du Seigneur. Car ce sera comme un chant de cantiques à la louange de Dieu que d’être pleins de reconnaissance pour le bonheur de posséder une gloire si abondante, et que d’être toujours occupés à rendre des actions de grâces à sa divine Majesté.

6. « Je le remplirai d’une longueur de jours. » C’est comme s’il disait : je sais ce qu’il désire : je sais ce dont il a soif, et ce qu’il goûte le plus, ce n’est ni l’or, ni l’argent, ni la volupté, ni la curiosité ni aucune dignité du siècle. Il méprise tout cela et n’en fait pas plus de cas que du plus vil fumier. Il a vidé son cœur de toutes ces choses, et il ne peut souffrir qu’aucune d’elle l’occupe, parce qu’il sait qu’aucune ne saurait le remplir. Il n’ignore pas à l’image de qui il a été fait, et de quelle grandeur il est capable ; et il ne veut point s’accroître un peu d’un côté pour diminuer beaucoup de l’autre. C’est pourquoi « je comblerai de jours celui qui ne saurait être satisfait et rempli que par la véritable et l’éternelle lumière. Et la longueur de ces jours sera sans fin, l’éclat de leur lumière sans défaillance, et l’abondance, dont je le remplirai, n’engendrera jamais pour lui aucun dégoût. Car son bonheur sera parfaitement assuré, sa gloire puisera sa source dans la possession de la vérité, et l’abondance sera toujours pour lui une source de joie et de délices. « Je lui ferai part du salut que je destine à mes saints. » Cela signifie que le fidèle méritera de voir ce qu’il a désiré, lorsque le roi de gloire rendra l’Eglise, son épouse, toute glorieuse et la montrera sans tache, sans rides et sans défauts, à cause de la splendeur permanente du jour dans lequel elle sera établie. Les âmes qui ne sont pas entièrement pures, ni les âmes qui sont dans quelque sorte d’agitation et de trouble, ne sont point encore capables de recevoir cette lumière de gloire que Jésus-Christ prépare aux élus. C’est pourquoi Notre-Seigneur nous commande par son Apôtre, ainsi que je l’ai dit, de nous établir dans la sainteté et dans la paix (Heb. XII, 14), parce que sans ces deux choses personne ne pourra voir Dieu. Quand donc il aura rempli vos désirs par les biens dont il vous donnera la possession, en sorte que vous n’aurez plus rien à désirer, votre espri, devenant tout à fait tranquille par cette plénitude même, vous pourrez alors contempler la sérénité et la majesté de Dieu ; et vous lui serez semblable parce que vous le verrez comme il est. Peut-être bien aussi, peut-on dire que les saints, ayant en eux-mêmes toute la plénitude de la gloire qui leur sera propre, du sein des délices éternelles, considéreront de tous côtés les choses que Dieu a faites pour le salut et la félicité des hommes, et verront reluire sa Majesté sur toute la terre. On pourrait rapporter à cela ces paroles «Je lui montrerai le salut que je destine à mes saints. »

7. Nous pouvons encore entendre ce verset, de la jouissance de ces jours où Dieu promet qu’il montrera le salut aux saints : « Je le remplirai, dit-il, d’une longueur de jours. « Et comme pour répondre à cette objection, d’où viendra cette longueur de jours dans la céleste cité, où le soleil n’aura pas à luire pour faire le jour, puisqu’il n’y aura pas de nuit, il ajoute : «je lui montrerai le salut que je destine à mes saints : » ce salut n’étant autre chose que le Sauveur dont la splendeur éclairera toujours les saints, selon cette parole de l’Écriture : « l’Agneau est la lumière (Apoc. XXI, 23). » « Je lui montrerai l’auteur du salut, » c’est-à-dire : je ne l’instruirai plus par la foi ; je ne l’exercerai plus par l’espérance ; mais je le remplirai par la contemplation même du Sauveur, je le lui montrerai : » je lui montrerai Jésus-Christ, afin qu’il contemple éternellement ce Rédempteur en qui il a cru, qu’il a aimé, qu’il a toujours désiré. Seigneur, montrez-nous votre miséricorde (Psal. LXXXIV, 8), et donnez-nous ce Sauveur, qui ne peut venir que de vous, et cela nous suffit ; car celui qui le voit, vous voit aussi, parce qu’il est en vous, et que vous êtes en lui. Or, toute la vie éternelle, consiste à vous connaître, parce que vous êtes le vrai Dieu, et à connaître Jésus-Christ que vous nous avez envoyé (Joan. XVII, 3). Et alors vous laisserez aller votre serviteur en paix, selon votre parole, parce que mes yeux verront le Sauveur que vous avez donné au monde, votre Jésus Notre Seigneur qui est Dieu et béni par dessus tout, dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.

Texte intégral – Saint Bernard – Dix-sept sermons sur le psaume 90
- Dix-septième sermon


Solennités en septembre

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En dehors de ces jours, consulter les Horaires Messes et Offices

JEUDI 8 SEPTEMBRE – Nativité de la Vierge Marie – Solennité

Horaire habituel du dimanche – Messe à 10h

SAMEDI 10 SEPTEMBRE – Férie

– 11h00 : Messe pour la Paix
– 14h00 : None
– 14h15 à 17h00 : Adoration
– 17h15 : Vêpres

MERCREDI 14 SEPTEMBRE – La Croix Glorieuse – Fête

Horaire habituel

JEUDI 29 SEPTEMBRE – Saint Michel, Saint Gabriel, Saint Raphaël Archanges – Fête

Horaire habituel

N.B. – tous les lundis jour de désert, messe lue, vêpres à 18h

Calendrier du mois : Messes-Septembre-2022     


Saint Bernard – 20 août

Le samedi 20 août, solennité de Saint Bernard, la messe sera à 11h, présidée par Mgr Jean-Philippe Nault, Evêque de Nice


Solennités en août

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JEUDI 4 AOUT – Saint Jean-Marie Vianney – Mémoire

Messe à 10h30

SAMEDI 13 AOUT – Vierge Marie – Mémoire

– 11h00 : Messe pour la Paix
– 14h00 : None
– 14h15 à 17h00 : Adoration
– 18h00 : Vêpres

LUNDI 15 AOUT – Assomption de la Vierge Marie – Solennité

Horaire habituel du dimanche – Messe à 10h

MARDI 16 AOUT – Férie

Jour de désert – Laudes à 8h, Messe à 17h, Vêpres à 18h

SAMEDI 20 AOUT – Saint Bernard – Solennité

Horaire habituel du dimanche – Messe à 11h – Présidée par Mgr Jean-Philippe Nault , Evêque de Nice

N.B. – tous les lundis (sauf le 15) et mardi 16, jour de désert, messe lue, vêpres à 18h

Calendrier du mois : Messes-Août-2022     


Août – Psaume 90 – 16

Mois d’août

Ecoutons Saint Bernard – Sermon 16 sur le psaume 90

SEIZIÈME SERMON. « Il a crié vers moi, et je l’exaucerai. Je suis avec lui dans l’affliction (Psal. XC, 15).»

aout2022-4001. « Il a crié vers moi et je l’exaucerai. » Voilà des paroles de paix, une alliance digne de la bonté de Dieu; un vrai traité de miséricorde et de compassion. « Il a espéré en moi et je le délivrerai. » Il a connu mon nom et je le protégerai. Il m’a invoqué, et je l’exaucerai. Dieu ne dit pas : il était digne de ma grâce, il était juste et droit, ses mains étaient innocentes et son cœur était pur, voilà pourquoi je le délivrerai, je le protégerai et je l’exaucerai. S’il s’était exprimé ainsi, qui ne tomberait dans le désespoir ? Qui peut se flatter d’avoir le cœur pur ? Mais, Seigneur, puisque, vous avez tant de clémence et tant de miséricorde, je mets en vous toute ma confiance ; la loi que vous vous êtes donnée fait tout mon soutien en votre présence. Quelle loi pleine de douceur que celle qui n’exige point d’autre mérite, pour être exaucé, que le cri et l’ardent désir de celui qui demande. « Il est bien juste que Dieu n’exauce pas celui qui ne crie point vers lui, ne lui adresse aucune prière ; ou ne le prie qu’avec tiédeur et négligence. Or pour Dieu, le grand cri de l’âme qui se fait entendre de lui, c’est un ardent désir ; au contraire l’intention froide et languissante est, pour lui, comme une parole si faible, qu’il ne saurait l’entendre. Comment pourra-t-elle pénétrer les nuées et se faire écouter dans le ciel ? L’homme est averti dès les premières paroles de la prière qu’il fait tous les jours, que le père auquel il adresse ses demandes est dans le ciel, afin qu’il sache qu’il doit crier de toutes ses forces pour faire monter sa prière vers le ciel par l’effort puissant de son esprit, comme une flèche qu’il décoche. Dieu est un esprit, et il est nécessaire que ceux qui désirent que leurs cris parviennent jusqu’à lui, crient en esprit et en vérité (a). Car, de même que Dieu ne regarde point le visage de l’homme, comme font les hommes, mais considère seulement le cœur, ainsi il écoute plutôt la voix intérieure du cœur que la voix sensible du corps. Voilà pourquoi le Prophète lui dit: « Vous êtes le Dieu de mon cœur. (Psal. LXXII, 26). » C’est après cela aussi que Moïse, sans prononcer aucune parole, est néanmoins intérieurement entendu de Dieu, selon le témoignage qu’il lui en donne en lui disant : « Pourquoi criez-vous vers moi. (Exod. XIV,15) ? »

(a) Il se rencontrait ici une grave solution de continuité, car depuis ces mots : « il ne dit pas, etc. », jusqu’à ceux-ci. « S’il s’était exprimé ainsi, etc. » la plupart des éditions précédentes avaient omis les phrases que nous avons rétablies d’après les manuscrits de Corbie, de Cîteaux, et d’autres encore.

2. « Il a crié vers moi, et je l’exaucerai. » Ce n’est pas sans sujets que le fidèle crie ainsi vers Dieu. Il pousse un grand cri parce que ses besoins sont grands. Mais en criant de toutes les forces de son âme, que demande-t-il, sinon d’être consolé, délivré, établi dans la gloire ? C’est pour ses propres besoins qu’il crie ; comment, en effet, serait-il exaucé dans ces vœux-là, s’il en avait fait d’autres ? « Je l’exaucerai, dit le Seigneur. » De quelle manière, Seigneur, et en quoi l’exaucerez-vous ? « Je serai avec lui lorsqu’il sera dans l’affliction je l’en tirerai et le remplirai de gloire. »

Il me semble que je puis avec raison rapporter ces trois cris de la prière aux trois grands et saints jours que nous devons bientôt célébrer, car il s’est soumis pour nous à l’affliction et à la douleur, lorsqu’il a souffert le supplice de la croix, malgré son ignominie, en vue de la joie éternelle qui lui était proposée (Luc. XXII). Ce fut alors que les choses qu’il devait accomplir sur la terre furent terminées, comme il l’avait prédit avant sa mort. Et lorsqu’il eût dit en mourant : « Tout est consommé », il entra dans son repos, mais la gloire de la résurrection ne se fit point attendre, le troisième jour, le Soleil de justice se leva pour nous dès le matin, et sortit du tombeau. En sorte que le fruit de l’affliction qu’il avait soufferte, et la vérité de sa délivrance parurent dans la gloire de sa résurrection. Ces trois choses qui sont arrivées en Jésus-Christ dans l’espace de trois jours doivent aussi nous arriver. « Je suis avec lui dans la tribulation, » dit le Seigneur. Quand se trouve-t-il ainsi avec nous ! sinon le jour de nos tribulations ? le jour où nous portons notre croix ? alors que s’accomplit cette parole du Seigneur à ses disciples : « Vous aurez des traverses et des angoisses dans le monde (Joan. XVI, 33). » et celle de son Apôtre : « tous ceux qui veulent vivre avec piété en Jésus-Christ souffriront des persécutions. (II Tim. III, 12). » Car notre délivrance pleine et parfaite ne pourra pas arriver avant le jour de notre mort, parce que les enfants d’Adam sont réduits à porter un joug pesant et fâcheux depuis le jour qu’ils sortent du ventre de leur mère, jusqu’au jour où ils rentreront dans le sein de la terre, la mère commune de tous les hommes. C’est alors seulement, dit le Seigneur, que je le délivrerai, et le monde ne pourra plus faire souffrir quoi que ce soit à son corps ni à son âme. Pour ce qui est de la gloire qui l’attend encore, elle ne lui sera donnée qu’à la fan des temps, le jour de la résurrection, alors que ce corps, maintenant dans l’ignominie, comme un grain qui se pourrit dans la terre, renaîtra dans la gloire.

3. Comment savons-nous que Dieu est avec nous dans l’affliction ? C’est précisément parce que nous y sommes maintenant. Car qui pourrait soutenir les maux de cette vie ; qui pourrait durer et subsister avec eux sans son assistance particulière ? Nous devons estimer, mes chers frères, que nous avons toute sorte de sujet de nous réjouir lorsque nous éprouvons des calamités nombreuses : non-seulement, parce que nous ne devons entrer dans le royaume de Dieu que par beaucoup de souffrances, mais, encore parce que le Seigneur est proche de ceux dont le cœur est dans l’affliction. (Act. XXII, 4). « Si je marche au milieu des ombres de la mort, dit le Prophète (Psal. XXXIII, 19), je ne craindrai point les maux qui m’arriveront, parce que vous êtes avec moi. (Psal. XXII, 4). » Voilà donc comment il est avec nous tous, les jours de notre vie jusques à la consommation des siècles. Mais quand serons-nous avec lui ? Ce sera quand nous serons transportés en l’air pour aller, comme dit l’Apôtre, au devant de Jésus-Christ, et que nous demeurerons toujours avec lui. Quand sera-ce que nous nous verrons dans la gloire avec ce Sauveur ? Ce sera lorsqu’il viendra se montrer, lui qui est notre vie. Mais en attendant il faut que nous demeurions cachés, que l’affliction précède notre délivrance, et que notre délivrance précède notre glorification. Ecoutez le langage de celui qui est délivré : « Mon âme, tournez-vous vers votre repos, puisque le Seigneur vous a comblée de ses bienfaits : il a retiré mon âme de la mort, mes yeux des larmes et mes pieds de la chute. Je l’arracherai et le glorifierai. (Psal. CXIV, 7). » Seigneur, heureux l’homme que vous daignez consoler et soutenir en cette vie, vous qui êtes son soutien dans la bonne comme dans la mauvaise fortune. Mais combien est-il plus heureux lorsque vous l’avez effectivement délivré et que vous l’avez exempté de tant de maux auxquels il s’est exposé. Combien est-il plus heureux lorsque vous l’avez dégagé du filet des chasseurs, lorsque vous l’avez retiré du monde, afin que la malice ne changeât pas son esprit, et que les déguisements et les artifices ne pussent surprendre et tromper son âme ? Il sera néanmoins encore infiniment plus heureux lorsque vous l’aurez tout à fait élevé et uni à vous, rempli des biens de votre sainte maison, et mis dans un état conforme et semblable à celui de votre gloire.

4. Et maintenant, mes chers enfants, élevons vers le ciel le cri de nos cœurs, et notre Dieu aura pitié de nous. C’est vers le ciel que nous devons faire monter nos cris, puisque c’est sous le ciel, comme observe le sage, qu’on ne trouvera que douleur et travail, vanité et affliction d’esprit. (Jerem. XVII, 9). D’ailleurs le cœur de l’homme est méchant et impénétrable : ses sens ne se portent qu’au mal. Il n’y a nul bien en moi, c’est-à-dire en ma chair. La loi du péché habite en elle, elle a toujours des désirs contraires à l’esprit. Enfin mon propre cœur me manque, et mon corps est dans la nécessité de mourir à cause du péché. Les peines qui se succèdent les unes aux autres suffisent à remplir chaque jour. Le monde n’est que méchanceté et corruption. Combien le siècle présent est-il injuste ? Combien voyous-nous que l’âme est combattue par les désirs de la terre? Nous sommes attaqués de tous les côtés par les princes de ce monde qui règnent dans les ténèbres, par les esprits mauvais, les puissances de l’air et surtout par le serpent le plus rusé de tous nos ennemis. Voilà tous les finaux que nous avons à craindre sous le soleil. Voilà toutes les misères qui sont sous le ciel. Où trouvez-vous un refuge contre tous ces maux et contre toutes ces misères ? Où espérez-vous du soulagement ? Où prétendez-vous trouver du secours ? Si vous le cherchez en vous, vous ne trouvez qu’un cœur détaché, et vous-même, vous vous trouvez livré à l’oubli, comme si votre cœur était mort. Si vous le cherchez plus bas que vous, vous ne trouverez que le corps qui est susceptible de se corrompre et qui appesantit votre âme. Enfin, si vous le cherchez dans toutes les choses de la terre qui vous environnent, vous trouverez aussi qu’elles ne sont capables que d’accabler ceux qui s’occupent des soins multipliés de cette vie (Sag. IX, 15). Cherchez donc un refuge au dessus de vous. Mais prenez garde, en vous élevant, de passer au delà de la troupe des esprits vaniteux. Ils savent que tout ce que nous avons de parfait et de bon, ne saurait venir que d’en haut : voilà pourquoi ils se tiennent entre le ciel et la terre comme des voleurs en embuscade. Faites donc en sorte de passer au delà de ces esprits méchants qui travaillent, avec une malice infatigable, pour nous empêcher de nous élever jusque dans la sainte cité. S’ils vous blessent, s’ils vous outragent, imitez Joseph qui laissa son manteau, entre les mains de l’adultère Égyptienne (Gen. XXXIX, 15). Abandonnez même votre dernier vêtement, comme le jeune homme dont il est parlé dans l’Evangile (Marc. XIV, 52), qui s’échappa nu des mains de ceux qui le tenaient. Dieu n’abandonna-t-il pas au démon le dernier vêtement de Job, et après cela ne lui donna-t-il point le pouvoir de lui nuire dans ses biens et même de l’affliger en son corps, en se contentant de lui dire : conserve seulement sa vie ? Élevez donc votre cœur vers Dieu, poussez le vers lui, que vos cris et vos désirs ne tendent qu’à lui, que votre vie, que toutes vos espérances soient dans le ciel. Criez vers le ciel pour être exaucé, et que votre père, qui est dans le ciel, vous envoie, de son sanctuaire, le secours dont vous avez besoin, et que vous receviez de la céleste Sion, aide et protection, que Dieu vous soutienne dans l’affliction, vous arrache aux épreuves et vous glorifie, enfin, dans la nouvelle vie de la résurrection. Ces choses sont grandes à la vérité ; mais vous êtes grand aussi, vous qui nous les avez promises. Nous les espérons de vos promesses, et nous osons dire, avec l’Église : Si nous crions vers vous avec un cœur plein de confiance, vous nous devez ce que nous vous demandons à cause de vos promesses. Ainsi soit-il.

Texte intégral – Saint Bernard – Dix-sept sermons sur le psaume 90
- Seizième sermon


Juillet – Psaume 90 – 15

Mois de juillet

Ecoutons Saint Bernard – Sermon 15 sur le psaume 90

QUINZIÈME SERMON. « Parce qu’il a espéré en moi, je le délivrerai : je le protégerai, parce qu’il a connu mon nom (Psal. XC, 14). »

juillet2022-4001. «Venez à moi vous tous qui travaillez et qui êtes chargés, et je vous, soulagerai, dit Notre Seigneur. Mettez mon joug sur vous : et vous trouverez le repos de vos âme, parce que mon joug est doux et mon fardeau léger. (Math. XI, 28.) » Il invite ceux qui sont accablés de travail à venir chercher du soulagement, et ceux qui sont chargés à venir prendre du repos. Toutefois, il ne décharge pas pour cela ceux qui vont à lui de toute sorte de fardeau et de travail. Il change plutôt leur fardeau et leur travail en un autre, une charge pesante en une légère, un joug insupportable en un joug infiniment doux, dans lesquels on ne trouve que rafraîchissement et repos. Et si d’abord cela ne vous paraît pas, on reconnaît pourtant bientôt qu’il en est ainsi. Sans doute l’iniquité est un fardeau plus pesant que le plomb dont il est parlé dans un prophète. C’était sous cette charge pesante que gémissait le pécheur qui disait : « Mes iniquités s’élèvent au dessus de ma tête : (Zach. V, 7,) et elles se sont appesanties sur moi comme un fardeau pesant. (Psal. XXXVII, 5). »

Quel est donc ce fardeau de Jésus-Christ, si léger et si doux ? Selon moi, ce n’est autre chose que le fardeau de ses bienfaits et de ses grâces. O qu’il est doux et aimable ! Mais pour ceux qui le sentent, pour ceux qui l’éprouvent. Car si vous ne le trouvez pas tel, si vous ne vous apercevez pas qu’il est ainsi, il vous est pesant alors et périlleux. L’homme, pendant sa vie mortelle, est comme un animal destiné à porter toujours une charge. S’il porte encore ses péchés, il est surchargé et s’il est soulagé de ce fardeau sa charge est moins lourde. Mais si cet homme est éclairé de la véritable sagesse et s’il sait estimer les choses comme elles sont, la grâce, par laquelle Notre Seigneur l’a déchargé de ses péchés, lui paraîtra une charge aussi grande que l’autre. Dieu donc nous charge en diminuant notre fardeau. Il nous charge de ses grâces, en nous déchargeant de nos péchés. Ecoutez le cri d’un homme chargé des bienfaits de Dieu : « Que rendrai-je au Seigneur pour toutes les choses qu’il m’a données. (Psal. CXV, 12). » Ecoutez encore un homme qui se voyait comblé de grâces : « Eloignez-vous de moi, Seigneur, parce que je suis un pécheur (Luc. V, 8). » Entendez enfin le langage d’un serviteur de Dieu chargé de ses dons : « J’ai toujours craint Dieu, et j’ai toujours, appréhendé sa colère, comme on craindrait d’être submergé par les flots de la mer lorsqu’elle est agitée (Job XXXI, 23). » J’ai toujours craint, dit-il, j’ai craint avant que d’avoir reçu le pardon de mes péchés, j’ai continué de craindre après l’avoir obtenu. Heureux l’homme qui est ainsi toujours dans la crainte et n’est pas moins soucieux de ne se point laisser accabler par les bienfaits de Dieu que par ses propres péchés.

2. Quand on nous représente la libéralité de Dieu si continuelle et si abondante envers nous, c’est principalement pour nous porter à la reconnaissance, et pour nous exciter à l’aimer. Il a commandé à ses anges de vous garder en toutes vos voies. Qu’a-t-il pu faire de plus qu’il n’aie pas fait ? Mais je vois bien à quoi vous pensez, âme généreuse, vous êtes heureuse d’avoir les anges du Seigneur près de vous. Mais vous aspirez à posséder le Seigneur même des anges. Vous demandez, et vous désirez de tout votre cœur, que celui qui vous encourage par ces paroles ne se contente pas de vous envoyer ses ministres, mais veuille lui-même, sans cesser d’être présent, vous donner un baiser de sa bouche. Vous avez appris que vous marcherez sur l’aspic et sur le basilic, sur le lion et sur le dragon, et vous êtes sûre de la victoire que l’archange Michel, et que tous les anges doivent remporter sur le dragon, Cependant ce n’est pas vers cet archange, mais c’est vers le Seigneur même que vos désirs vous font soupirer et crier : «Délivrez-moi et mettez-moi près de vous, et après cela que la main de qui que ce soit s’arme contre moi (Job XVII, 3). » Se trouver dans ces dispositions, ce n’est pas chercher un refuge plus haut que les autres refuges ; mais c’est s’en assurer un plus haut que les plus hauts, et mériter de pouvoir dire : « Seigneur, vous êtes mon espérance» et d’entendre au fond de sou cœur cette réponse : « Vous avez pris un refuge extrêmement élevé. »

3. Le Seigneur plein de miséricorde et de compassion ne dédaigne pas d’être lui-même l’espérance des misérables. Il ne refuse pas de se faire lui-même le libérateur, et le protecteur de ceux qui espèrent en lui. «Parce qu’il a espéré en moi, dit-il, je le délivrerai, je le protégerai, lui, parce qu’il a connu mon nom (Psal. CXXVI, 3) » Il est certain que si le Seigneur ne garde pas la forteresse en vain celui qui la garde, qu’il soit homme ou ange, se tient l’œil au guet. Il y a des montagnes autour de Jérusalem; mais c’est peu de chose ; ce ne serait même rien, si le Seigneur lui-même ne demeurait autour de son peuple. C’est pourquoi l’Épouse représentée avec raison comme ayant trouvé les gardes qui veillaient à la défense de la ville (Cant. III, 3), ou plutôt comme ayant été rencontrée elle-même par eux, puisqu’elle ne les cherchait pas, n’est point encore contente d’être ainsi gardée, mais s’informe promptement de son Époux, et va le trouver avec une vitesse incroyable. Son cœur n’était point à ces gardes, et toute sa confiance était en son Seigneur : si on veut l’en détourner, elle répond : « Je me confie en Dieu, comment pouvez-vous dire à mon âme : Transportez-vous comme un oiseau sur la montagne (Psal. X, 2) ? » Les Corinthiens n’observèrent pas combien est importante et nécessaire cette confiance qui n’a que Jésus-Christ pour objet, lorsqu’ayant rencontré, comme l’Épouse du Cantique, des gardes et des sentinelles établies pour le salut de leurs âmes, ils s’arrêtèrent à eux. « Je suis à Céphas, je suis à Paul, je suis à Apollo, disaient-ils (I Cor. I, 12). » Mais que firent les ministres de Jésus-Christ, si modérés, si vigilants et si circonspects ? Car, ils ne pouvaient pas garder pour eux l’Épouse pour laquelle ils n’avaient entre eux qu’une émulation toute sainte, et qu’ils voulaient conduire et présenter à Jésus-Christ, comme une vierge toute chaste et toute pure. L’Épouse des Cantiques continue : « Ils m’ont frappée et m’ont fait des blessures (Cant. X, 7). » Pourquoi la frappaient-ils ? Sans doute pour la presser de passer outre et d’aller chercher son époux plus loin. Ces gardes, dit-elle, m’ont ôté mon manteau. C’était, sans doute afin qu’elle courût plus vite vers l’objet de son amour. Remarquez, avec moi, combien l’Apôtre frappe de même avec force les chrétiens de Corinthe, de quelles flèches il les blesse, parce qu’ils semblaient vouloir s’arrêter et se complaire avec les gardes: « Est-ce Paul, dit-il qui a été crucifié pour vous, ou bien avez-vous été baptisés au nom de Paul ? Lorsque quelqu’un d’entre vous dit : Je suis de Paul, l’autre : je suis d’Apollo, n’êtes-vous pas des hommes ? Que pensez-vous donc que soit Apollo ? que soit Paul ? Ce ne sont que les serviteurs de celui en qui vous croyez. Je le délivrerai, dit le Seigneur, parce qu’il a espéré en moi. Ce n’est point en ceux qui veillaient sur son salut, ni en moi, homme, ni en un ange, mais en moi seulement qu’il a espéré, dit le Seigneur, il n’attendait rien de bon que de moi non pas même du ministère de ceux qui me représentent. Car tout don parfait, et tout bien excellent vient du ciel, et nous est donné par le Père des lumières (Jac. I, 17). C’est par moi que toute la vigilance et tous les soins des hommes sont utiles, et qu’ils peuvent tirer quelque fruit de leurs travaux. Car c’est par moi qu’ils veillent comme ils doivent sur les âmes . C’est par moi que les anges sont si vigilants dans leur ministère, ont l’œil ouvert sur les plus secrets mouvements des âmes qu’ils portent à de saints mouvements, et qu’ils éloignent les suggestions malignes de l’ennemi. Mais il est toujours nécessaire que je garde moi-même le cœur de l’homme, dont les yeux, ni même ceux des anges ne sauraient pénétrer le secret.

4. Reconnaissons donc, mes frères, que nous avons autour de nous trois sortes de gardiens et ayons soin de nous acquitter de nos différents devoirs à l’égard de chacun d’eux, et faisons le bien, en même temps, sous les yeux des hommes, des anges et de Dieu. Appliquons-nous à les contenter en toutes choses, mais mettons principalement tout notre cœur à plaire à celui qui est plus que tout pour nous. Chantons ses louanges en présence des anges et que cette parole du Prophète s’accomplisse en eux : « Ceux qui vous craignent me regarderont, et seront dans la joie, parce que j’ai mis toute mon espérance dans votre parole (Psal. XVIII, 74).» Obéissons à nos supérieurs qui veillent de tout leur pouvoir, parce qu’ils auront à rendre compte de nos âmes, afin qu’ils ne s’acquittent pas de ce devoir avec mécontentement et tristesse (Hebr. XIII, 17). Mais, grâce à Dieu, je n’ai pas besoin de vous faire de grandes recommandations, ni d’avoir de crainte pour vous au sujet des supérieurs. Votre obéissance est prompte et fidèle comme votre vie est irrépréhensible, et c’est ce qui fait ma joie et ma gloire. Et combien ces joies seraient-elles encore plus grandes, si j’avais la certitude que les anges même ne peuvent voir en vous rien d’indigne de votre état, rien d’échappé à l’anathème de Jéricho, ni personne parmi vous qui murmure et qui médise en secret, personne qui agisse avec hypocrisie, ou avec relâchement, personne enfin qui entretienne dans son esprit de ces pensées honteuses et lamentables qui mettent quelquefois le trouble jusque dans les sens ? Sans doute, cette certitude augmenterait beaucoup ma joie, mais elle ne la rendrait, pas encore pleine et entière.

A la vérité, nous ne sommes pas tels que nous puissions nous mettre peu en peine de ne pouvoir être repris par les hommes, et de ne nous sentir coupables de rien. Mais si les plus grands serviteurs de Dieu craignent ses jugements, combien avons-nous sujet de trembler eu songeant que nous devons être examinés par ce juge ! Ah ! quelle serait ma joie si j’étais entièrement assuré qu’il n’y a rien dans aucun de nous qui puisse offenser cet œil divin qui seul connaît parfaitement tout ce qu’il y a dans l’homme, et qui voit en lui ce qu’il n’est pas capable d’y voir lui-même. Je vous en conjure, mes frères, que le souvenir des jugements de Dieu soit désormais toujours présent à nos pensées, qu’il nous remplisse d’autant plus de crainte et de tremblement, que nous pouvons moins comprendre l’abîme impénétrable et l’irrévocable portée de ses jugements. C’est avec cette crainte que notre espérance acquiert des mérites, elle seule lui fait produire tous ses fruits.

5. Et même si l’on observe, avec les lumières de la sagesse chrétienne, quelle est la nature de cette crainte, on trouvera qu’elle est un motif très-sûr et très-efficace de notre espérance. Car cette crainte est une des plus grandes grâces que nous recevons maintenant de sa bonté, et le fondement assuré des promesses de l’avenir. Enfin, Dieu se plait, comme dit le Prophète, en ceux qui le craignent, et notre vie est en sa volonté, et notre salut éternel dépend de son bon plaisir. « Parce qu’il a espéré en moi, je le délivrerai. (Psal. CXLVI, 11). » Avec quelle douce libéralité, Dieu ne manque jamais à ceux qui espèrent en lui ! Tout le mérite de l’homme consiste principalement à mettre toute son espérance en celui qui sauve tout l’homme : «vos pères ont espéré en vous, ils ont espéré, et vous les avez délivrés. Ils ont crié vers vous, et vous les avez sauvés. Ils ont espéré en vous, et ils n’ont pas été confondus. ( Psal, XX, 5). » Car où est celui qui a espéré en lui, et a été confondu ? Espérez en lui, peuple fidèle. Vous posséderez tous les lieux où vous poserez le pied. Oui, si loin que vous alliez dans votre espérance, vous posséderez tout le bien qu’elle aura embrassé si votre espérance est fondée solidement en Dieu, si elle est ferme et inébranlable. Pourquoi le fidèle, en espérant en Dieu de cette manière, craindrait-il l’aspic ou le basilic; pourquoi serait-il épouvanté par le rugissement du lion, ou par le sifflement du dragon ?

6. « Parce qu’il a espéré en moi, je le délivrerai. » Et afin que celui qui a été délivré n’ait pas besoin d’être délivré une seconde fois, je le protégerai et je le conserverai ! Si toutefois il reconnaît mon nom et ma puissance, ne s’attribue point sa délivrance et en rapporte toute la gloire à mon nom. « Je le protégerai, parce qu’il a connu mon nom. (Hebr. XI, 1). » Quand nous verrons Dieu face à face, ce sera pour nous la gloire : connaître maintenant son nom, est pour nous, en cette vie, la protection dont nous avons besoin. En effet, on n’espère plus quand on voit et quand on possède. La foi nous vient par l’ouïe, (Rom. vin, 24), elle fait subsister dans notre esprit l’objet de notre espérance, ainsi que nous l’apprend saint Paul. « Je le protégerai, parce qu’il a connu mon nom. » Or, ce n’est point connaître véritablement le nom de Dieu que de le prendre en vain, que de lui dire seulement, Seigneur, Seigneur, sans observer ce qu’il nous commande. Ce n’est pas connaître le nom de Dieu, que de ne point l’honorer comme notre Père et comme notre Seigneur. Ce m’est point connaître le nom de Dieu que de tourner nos affections vers les vanités et les folies du monde. Et il est dit : « L’homme est heureux lorsque le nom du Seigneur est toute son espérance et toute sa joie, et qu’il ne regarde point ces vanités et ces folies où il n’y a que de la fausseté et que de l’illusion. (Psal. XXXIX, 5). » Mais celui qui disait : « Il n’y a point d’autre nom donné aux hommes par lequel ils puissent être sauvés, (Rom. VIII, 24,) », connaissait bien ce grand nom de Dieu. Et si nous connaissons ce saint nom qui a été invoqué sur nous, nous devons désirer qu’il soit toujours sanctifié en nous. Nous devons toujours demander cette sanctification dans nos prières, selon que Notre-Seigneur nous a appris à le faire dans ces paroles « Notre père qui êtes dans les cieux, que votre nom soit sanctifié. » Mais remarquez encore ces paroles du verset que je vous explique. « Il a crié vers moi et je l’ai exaucé. (Matth. VI, 9). » Voilà quel est le fruit de la connaissance du nom de Dieu, c’est le cri de la prière que nous poussons vers lui. Or l’effet de cette clameur de l’âme qui prie, c’est d’être exaucée par le Sauveur. Car comment pourrait-elle être exaucée si elle n’invoquait pas ? Ou, comment pourrait-elle invoquer le nom du Seigneur si elle ne le connaissait pas? Rendons grâce à celui qui a manifesté aux hommes le nom du Père éternel, et qui a établi le salut dans l’invocation de ce nom tout puissant, selon cette parole d’un prophète : « Quiconque invoquera le nom du Seigneur sera sauvé. (Joël, II, 32).

Texte intégral – Saint Bernard – Dix-sept sermons sur le psaume 90
- Quinzième sermon


Solennités en juillet

Cette page indique uniquement les Solennités et autres fêtes ou particularités du mois.
En dehors de ces jours, consulter les Horaires Messes et Offices

SAMEDI 9 JUILLET – Vierge Marie – Mémoire

8h30 : Messe pour la Paix
– 14h00 : None
– 14h15 à 17h00 : Adoration
– 17h15 : Vêpres

LUNDI 11 JUILLET – Saint Benoît – Patron de l’Europe – Solennité

Horaire habituel du dimanche – Messe à 10h

N.B. – tous les lundis (sauf le 11) et mardi 12, jour de désert, messe lue, vêpres à 18h

Calendrier du mois : Messes-Juillet-2022     


Solennités en juin

Cette page indique uniquement les Solennités et autres fêtes ou particularités du mois.
En dehors de ces jours, consulter les Horaires Messes et Offices

VENDREDI 3 JUIN – Solennité – Anniversaire de la Dédicace de notre église

– Horaire du dimanche – Messe à 10h

SAMEDI 11 JUIN – Saint Barnabé – Mémoire

– 11h00 : Messe pour la Paix
– 14h00 : None
– 14h15 à 17h00 : Adoration
– 17h15 : Vêpres

MERCREDI 15 JUIN – Férie

– Messe à 7h30

JEUDI 23 JUIN – Solennité de la Nativité de Saint Jean-Baptiste

– Horaire habituel

VENDREDI 24 JUIN – Sacré Cœur de Jésus – Solennité

– 10h00 : Messe

MERCREDI 29 JUIN – Saint Pierre et Saint Paul – Apôtres – Solennité

– 10h00 : Messe

N.B. – tous les lundis (sauf le 27) et mardi 28, jour de désert, messe lue, vêpres à 18h

Calendrier du mois : Messes-Juin-2022    


Mai-Juin – Psaume 90 – 14

Mois de mai et juin

Ecoutons Saint Bernard – Sermon 14 sur le psaume 90

QUATORZIÈME SERMON. « Ils vous porteront entre leurs mains, etc. vous marcherez sur l’aspic et sur le basilic, etc (Psal. XC, 12, 13). »

1. mai2022-450Rendons grâces, mes frères, à notre créateur, à notre bienfaiteur, à notre rédempteur, à celui de qui nous devons attendre notre récompense, ou plutôt à celui qui est lui-même toute notre attente et toute notre espérance. Car il est lui-même tout à la fois, notre rémunérateur et notre rémunération et, dès maintenant, nous n’attendons rien de lui, que lui-même. D’ailleurs, considérons, premièrement, que nous tenons de lui tout ce que nous sommes, puisqu’il est certain qu’il nous a faits, et que nous ne nous sommes pas faits nous-mêmes. Vous semble-t-il que ce soit peu de chose que Dieu vous ait faits tels que vous êtes ? D’abord, selon le corps, il, vous a faits la plus noble et la plus parfaite de toute les créatures visibles et, selon l’âme, il vous a donné bien mieux encore, car il vous a faits à son image, il vous a communiqué la raison et l’intelligence, et vous a rendus capables d’une éternelle félicité. L’homme mérite d’être admiré par dessus toutes les autres créatures, à cause des deux parties qui le composent, et qui sont unies ensemble par l’art incompréhensible et par la sagesse impénétrable du Créateur en sorte que l’homme est un des plus grands effets de la puissance, aussi bien que de la bonté de Dieu. Mais combien gratuite ne fut pas cette bonté de Dieu ? Il est évident que l’homme n’a pu rien mériter avant sa création, puisqu’il n’était pas encore. Et après qu’il eut reçu l’être, avait-il sujet d’espérer qu’il pût reconnaître, par quelque bienfait, la grâce qu’il avait reçue de son Créateur ? « J’ai dit au Seigneur, dit le Prophète : Vous êtes mon Dieu, parce que vous n’avez besoin d’aucun bien qui soit en ma puissance ( Psal. XV, 2 ). » L’homme n’avait donc pas sujet de penser qu’il pourrait reconnaître les bienfaits de Dieu, par quelque bienfait ou quelque service, puisqu’il se suffit pleinement à lui-même. Mais c’était assez à cette créature si comblée de bienfaits, de se promettre de les reconnaître, autant qu’elle le pouvait. Pourquoi ne donnerions-nous point des témoignages de notre reconnaissance ? Si quelqu’un avait en quelque: sorte contribué à nous faire recouvrer le sens de la vue, de l’ouïe, de l’odorat que nous avions perdu, ou nous avait rendu l’usage de nos pieds depuis longtemps paralysés, si, dis-je, quelqu’un nous avait rétablis dans l’entier usage de la raison, après que nous en aurions été privés, quel homme, n’aurait pas une extrême indignation contre nous, s’il nous voyait oublier un bienfait de cette nature, et la reconnaissance que nous devrions à celui qui. nous aurait rendu de pareils services ? Que ne devons-nous donc point à Dieu qui a formé tous ces membres de rien, pour nous les donner, que dis-je, non-seulement il les a formés, mais, en les façonnant comme le chef-d’œuvre de tous ses ouvrages, il leur a donné, dans toutes leurs parties et dans toutes leurs fonctions, tout l’ordre, toute la beauté et toute la perfection dont ils étaient capables ? Quelles actions de grâces ne lui devons-nous point pour cela ?

2. Dieu ne s’étant pas contenté de nous avoir donné l’être en nous créant, a encore voulu ajouter à ce don tout ce qui devait en assurer la conservation, et en cela sa libéralité n’a pas été moins recommandable que sa puissance digne d’admiration. « Faisons, dit-il, l’homme à notre image, et à notre ressemblance (Gen. I, 26). » Et qu’ajoute-t-il après? « Qu’il soit le maître des poissons qui nagent dans la mer, des bêtes qui marchent sur la terre et des oiseaux qui volent dans l’air. Il venait de déclarer qu’il avait formé les cieux et les éléments pour l’usage de l’homme; car il avait dit qu’il avait créé les astres pour qu’ils fussent des signes et qu’ils marquassent les temps, les jours et les années. Pour qui tout cela, sinon pour nous ? Car les autres créatures, ou n’ont aucun besoin de ces signes, ou ne sont point capables de les entendre. Quelle richesse, quelle libéralité dans le bienfait de notre conservation ! le second qui réclame notre reconnaissance ! Combien de choses ne nous a-t-il point données pour soutenir notre vie ? Combien pour nous instruire ou pour nous consoler ? Combien aussi pour nous corriger et nous ramener à lui lorsque nous nous égarons ? Combien, enfin, en a-t-il faites qui ne sont destinées qu’à notre plaisir ? Mais s’il nous a donné l’être et s’il nous le conserve sans que nous ayons pu le mériter, c’est un double bienfait doublement gratuit. Et que dis-je doublement gratuit ? S’il nous a donné ces deux biens sans mérite de notre part, il nous les a donnés aussi sans aucune peine, sans aucun travail, et avec une merveilleuse facilité. «Il n’a fait que dire, et aussitôt toutes choses ont été faites (Psal. XXXII, 9). » S’il les a faites de rien, elles ne lui ont aussi rien coûté, faut-il pour cela que nous soyons moins pieux, moins fervents, moins reconnaissants ? Mais c’est le propre d’un cœur pervers de chercher des occasions et des prétextes d’ingratitude ? On ne peut en user ainsi, qu’on ne soit ingrat sans le moindre sujet. Le double bien que nous avons reçu, nous est-il moins utile parce qu’il a peu coûté à celui qui nous l’a donné ? Si quelqu’un de nous estimait que les biens qui coûteraient davantage à Dieu nous seraient pour cela plus utiles, il raisonnerait d’après lui-même et d’une manière qu’il aurait apprise dans son cœur, non ailleurs. Ainsi, il est certain que, pour l’ordinaire, on serait plus prompt à donner un secours a son prochain s’il coûtait peu à rendre, néanmoins personne ne voudrait que cette circonstance, d’avoir fait plaisir, facilement, et sans s’être donné de peine, fût. un motif pour celui qu’on a obligé de se croire dispensé de reconnaissance.

3. Cependant Dieu n’a pas borné là ses bienfaits, il en est un troisième, celui de notre Rédemption, qui mérite que nous nous arrêtions à le considérer. Nous ne saurions nous excuser de même d’en concevoir de la reconnaissance, car il lui a coûté beaucoup à nous les procurer. En effet, s’il nous a rachetés gratuitement, et sans que nous l’ayons mérité en aucune sorte, ce n’a pas été sans qu’il lui en contât beaucoup. Il nous a sauvés sans qu’il nous en ait rien coûté, mais ce n’a pas été pour rien. Comment l’amour que nous lui devons est-il languissant et assoupi au fond de notre cœur ? Que dis-je, comment est-il mort ? Car l’âme qui ne répond point à ce bienfait par des actions de grâces et des cantiques de louange ne dort plus, elle est morte. Il est évident que ce troisième bien nous rend les deux premiers beaucoup plus recommandables, en nous montrant que ç’a été par un véritable amour, que Dieu nous les a donnés, et que, s’il nous a créés, et s’il nous conserve avec une grande facilité et sans peine, ce n’est pas parce qu’il n’a point voulu le faire autrement; mais c’est parce qu’il n’a pas fallu qu’il le fit d’une autre manière. Notre Dieu nous a donc faits. Il a fait une infinité de choses poux, nous. Et enfin il s’est fait homme lui-même pour nous. Le « Verbe s’est fait chair et il a demeuré parmi nous (Joan. I, 14). » Que peut-il de plus ? Il s’est fait une même chair avec nous, et il fera que nous ne soyons qu’un même esprit avec lui. Que ces quatre bienfaits ne sortent donc jamais de votre esprit ni de votre bouche, de votre mémoire ni de votre cœur. Pensez-y toujours. Mettez vos délices à les méditer. Excitez et pressez votre âme par la vive considération de ces bienfaits. Tâchez de l’enflammer en l’y tenant attentive, afin qu’elle paie d’un juste retour celui qui nous témoigne son amour de tant de manières. Souvenons-nous surtout de ce qu’il nous dit lui-même : « Si vous m’aimez, gardez mes commandements (Joan. XIV, 15). » Observez donc les commandements de votre créateur de votre bienfaiteur, de votre rédempteur et de votre rémunérateur.

4. Si les bienfaits de Dieu sont au nombre de quatre, quel est le nombre de ses commandements ? Il n’est personne qui ne sache qu’il y en a dix, et si nous multiplions le nombre quatre par le nombre dix nous aurons le nombre quarante, la vraie et spirituelle quadragésime. Seulement il faut être dans la défiance et dans la crainte, et préparer nos âmes à la tentation. Prenez garde à la finesse du serpent. Observez les embûches de l’ennemi. Car il s’efforce d’empêcher par quatre sortes de tentations que nous ne nous acquittions des quatre actions de grâces que nous devons rendre à Dieu, à cause des quatre bienfaits dont je vous ai parlé. Jésus-Christ a éprouvé toutes ces tentations, selon ces paroles pleines de vérité de l’Apôtre : «Jésus-Christ a été tenté par toutes sortes de tentations, parce qu’il ressemblait aux pécheurs par sa chair, quoiqu’il fût sans aucun péché. » Quelqu’un, peut-être, s’étonnera de ma pensée, et dira qu’il n’a pas lu, dans l’Evangile, que Notre Seigneur eût souffert quatre sortes de tentations. Mais je crois que cela ne saurait faire une difficulté pour personne, si on n’a pas oublié que « la vie de l’homme est une tentation sur la terre (Job VII, 1). » Car celui qui considérera bien cette vérité sera persuadé que Notre-Seigneur n’a pas souffert seulement que les trois tentations marquées dans l’Evangile, lorsqu’il est dit qu’il jeûna dans le désert, qu’il fut porté sur le plus haut du temple, et sur le sommet d’une montagne. Dans ces trois occasions, la tentation qu’il souffrit était certainement manifeste. Mais la tentation qu’il souffrit depuis lors jusqu’à sa mort sur la croix fut plus véhémente que les trois premières, quoique plus cachée : et ce genre de tentations secrètes se rapporte assez aux pensées que j’ai émises touchant les bienfaits de Dieu. Car les trois premiers bienfaits étant consommés dès cette vie sont évidents, et connus de tout le monde. Mais quant au dernier bienfait, qui appartient à l’espérance de la vie éternelle, n’ayant pas encore son dernier, accomplissement, il n’est pas encore manifeste à nos yeux. Aussi ne devons-nous pas nous étonner si la tentation opposée à ce bienfait est cachée, puisque la cause de cette tentation l’est pareillement : mais elle est plus longue et plus forte, attendu que l’ennemi met en usage, contre notre espérance, tout ce qu’il a de méchanceté.

5. Afin donc premièrement de nous rendre ingrats envers l’auteur de la nature, il s’efforce de nous faire entrer en ce qui regarde cette nature, dans des soins beaucoup plus grands que nous n’en devons avoir. Et c’est ce qu’il tâcha d’inspirer même à Notre-Seigneur, lorsqu’il osa lui dire, pendant qu’il avait faim dans le désert : « Dites que ces pierres deviennent du pain (Matth. IV, 3). » Comme si celui qui nous a faits, ignorait les besoins de notre corps, ou comme si celui qui donne la nourriture aux oiseaux du ciel n’avait pas soin des hommes. Celui qui ne craindrait point de se prosterner devant Satan et de l’adorer, afin d’obtenir des biens temporels et passagers, que sa cupidité lui fait désirer avec ardeur, serait bien ingrat envers le Créateur, qui a fait tout le monde pour l’homme. « Je vous donnerai toutes ces choses, dit cet esprit méchant, si vous vous prosternez pour m’adorer. » Misérable, as-tu fait ces choses que tu promets de donner ? Comment pourras-tu donner ce que Dieu seul a créé ? Ou comment peut-on espérer recevoir de toi, et te demander, en t’adorant, les choses qui ne sont point en ta puissance, mais seulement en celle de Dieu qui les a faites ? Quant à la tentation par laquelle Satan sollicite Notre-Seigneur : de se précipiter du haut du temple, c’est un avertissement donné à tous ceux qui sont élevés aussi au plus haut du temple par leur ministère, de se tenir soigneusement sur leurs gardes. Pour vous donc qui êtes établis dans la maison de Dieu comme une sentinelle en observation, veillez sur vous. Oui, vous tous qui, dans l’Eglise de Jésus-Christ, occupez la plus haute place prenez garde à vous. Combien êtes-vous ingrats envers Dieu, et combien votre conduite est-elle injurieuse pour les mystères dont il vous a faits les dispensateurs, si vous regardez la religion et la piété comme un moyen de chercher vos intérêts, et de satisfaire à vos passions ? Combien êtes-vous infidèles à celui qui a sanctifié par son propre sang le ministère divin qu’il vous a confié, si vous cherchez par là votre propre gloire qui n’est rien, et vos propres intérêts, au lieu de rechercher les intérêts de Jésus-Christ ! Que vous répondez indignement à l’honneur qu’a daigné vous faire celui qui, dans la dispensation des mystères de sa chair, par lesquels il s’est humilié, vous a tant élevés au dessus des autres, qui vous a commis l’administration de ses divins sacrements, qui vous a donné une puissance toute céleste et peut-être plus grande que celle même qu’il a donnée à ses anges, si, de l’élévation où vous êtes, vous vous précipitez en bas, et si aux choses élevées et spirituelles vous préférez celles qui sont basses et terrestres. De même on ne peut douter que tous ceux qui, du comble des vertus où ils devaient être élevés par leur état, s’abaissent jusqu’à la recherche de la vaine gloire, ne rendent l’injure au lieu de l’action de grâce à ce Seigneur des vertus qui a souffert tant de peines parmi les hommes pour imprimer en eux la forme de sa sainteté.

6. Examinons attentivement, mes, frères, si cette première tentation qui tire notre âme de son repos à l’occasion et sous le prétexte des nécessités corporelles, ne mérite point d’être comparée à l’aspic. Cet animal, en effet, blesse les hommes par ses morsures, et se bouche les oreilles pour ne point entendre la voix de l’enchanteur. N’est-ce pas ce que le tentateur s’efforce de faire par ce genre de tentation, quand il essaie de boucher, et de fermer les oreilles de notre cœur aux consolations de la foi ? Mais l’ennemi ne réussit point par cette première tentation à l’égard de celui à qui il ne put boucher les oreilles du cœur et qui le confondit par cette réponse : « L’homme ne vit pas seulement de pain, mais de tout ce qui procède de la bouche de Dieu (Matth. IV, 4). » Mais dans ces paroles de Satan : « Je vous donnerai toutes ces choses, si vous vous prosternez pour m’adorer» vous pouvez reconnaître le sifflement du dragon qui se prépare à attaquer l’âme. On dit que ce serpent, caché dans le sable, attire à lui, par un souffle envenimé, même les oiseaux dans leur vol. Combien était envenimé le souffle du démon qui disait : « Je vous donnerai toutes ces choses, si vous m’adorez en vous prosternant ! Mais Notre Seigneur n’est pas si facile à prendre, et le souffle de ce dragon ne put rien sur lui.

7. Voyons ce que nous avons encore à dire du basilic. Il est plus à craindre que tous les autres monstres et l’on dit qu’il infecte et tue les hommes par sa seule vue. Le poison mortel, figuré par le venin de ce serpent, n’est autre chose que la vaine gloire, si je ne me trompe. « Prenez garde, dit Notre Seigneur, de ne point faire vos bonnes œuvres devant les hommes dans le but d’être vus par eux (Matth. VI, 1). » Comme s’il disait : Gardez-vous des yeux du basilic. Mais à qui pensez-vous que nuise cet animal ? C’est à ceux qui ne l’aperçoivent point. Car si on le découvre le premier, il ne peut nuire, à ce qu’on dit, mais plutôt on lui cause la mort. Il en est ainsi, mes frères, de la vaine gloire, elle fait mourir ceux qui ne l’aperçoivent pas, ceux qui sont aveugles et négligents, ceux qui se présentent et qui s’exposent à elle au lieu de regarder ou elle est, d’observer ses approches et de la discerner, ceux enfin qui ne savent point voir combien elle est frivole, périssable, vaine et inutile. Quiconque regarde la vaine gloire de cette manière donne la mort au basilic et la vaine gloire, au lieu d’avoir la puissance de lui ôter la vie de l’âme, meurt elle-même, tombe en poussière, et se réduit à rien. Il n’est pas besoin d’examiner, je pense, comment se rapporte à la vaine gloire la tentation que le démon fit éprouver à Notre Seigneur, lorsqu’il lui, dit : « Si vous êtes le Fils de Dieu, jetez-vous en bas (Matth. IV, 6). » Car pourquoi lui parla-t-il de la sorte, sinon afin de l’engager à se montrer au basilic, et à se faire louer par lui ?

8. Considérez avec moi comme ce basilic se cachait, pour empêcher Notre Seigneur de le découvrir le premier. « Il est écrit, disait-ils que Dieu, a commandé à ses anges de vous garder, et ils vous porteront entre leurs mains. » Esprit malin, dis-moi, oui, dis-moi ce qui est écrit:: « Il a commandé à ses anges. » Que leur a-t-il commandé ? Remarquez avec moi, je vous prie, que cet esprit, malin et trompeur omit les paroles qui pouvaient anéantir l’artifice que sa malice lui suggérait. Que leur a-t-il donc commandé ? Ecoutez le Psalmiste : « Qu’ils vous gardent dans toutes vos voies. » Est-ce dans des précipices, comme la distance du haut du temple jusques en bas ? Ce n’est pas là une voie, mais une chute, et si c’est une voie, ce ne petit être que celle du démon, non de Jésus-Christ. Esprit superbe, c’est en vain que tu emploies, pour tenter le chef des élus, des paroles saintes qui n’ont été écrites que pour consoler et fortifier ses membres. Il n’y a que ceux qui ont à craindre de se blesser les pieds contre des pierres qui ont besoin d’être gardés en marchant, celui qui n’a rien à craindre n’a pas besoin qu’on le garde. Pourquoi donc, esprit tentateur ne continues-tu point avec le Psalmiste : « Vous marcherez sur l’aspic et sur le basilic, et vous foulerez aux pieds le lion et le dragon ? » C’est, sans doute, parce que ces paroles te regardent. Une créature monstrueuse par sa méchanceté, et digne d’être foulée aux pieds, mérite d’être désignée par des noms d’animaux monstrueux eux-mêmes, et de les recevoir non-seulement de la bouche de celui qui est le chef de tous les fidèles, mais aussi de tous ses membres. Cet impitoyable ennemi, après la triple confusion que Notre Seigneur lui fit essuyer, n’eut plus recours contre lui à la ruse du serpent mais à la cruauté du lion, en l’accablant de mille injures et de mille outrages, en faisant pleuvoir sur lui les coups de la flagellation et les soufflets, enfin en le traînant à la mort ignominieuse de la croix. Mais le lion de la tribu de Judas t’a foulé aux pieds, lion rugissant et cruel. Il nous traite, mes frères, comme il a traité Notre Sauveur. Se voyant déçu dans toutes les entreprises qu’il a faites contre nous, ils nous suscite, dans sa fureur, une persécution différente de celle que nous avons endurée au commencement, pour tâcher de nous priver du royaume des cieux, par la violence des afflictions. heureuse l’âme qui foule aux pieds ce lion, avec force et courage, et se met en, état d’emporter et d’acquérir le royaume des cieux, par une sainte et salutaire violence.

9. Désormais donc, mes très-chers frères, marchons avec toute la précaution et tout le soin possible, comme si nous marchions sur des aspics et sur des basilics. Arrachons de notre cœur toute racine d’amertume, afin que personne, parmi nous, ne soit mordant dans ses paroles, audacieux inexorable et rebelle. Et gardons-nous bien de nous précipiter en bas, mais élevons-nous et passons par dessus le regard mortel de la gloire temporelle, sans la regarder, imitons les oiseaux, « devant lesquels on jette inutilement le filet (Prov. 1, 47). » Foulons aux pieds le lion et le dragon, afin que ni le rugissement de l’un, ni le sifflement de l’autre ne nous puissent nuire. Les quatre monstres du verset de notre psaume répondent chacun à quatre de nos passions. A quelle passion pensez-vous que répondent les embûches du dragon, c’est à Ia cupidité, parce qu`il sait qu’elle est la racine de toutes sortes de maux, et que c’est elle principalement qui met le cœur en désordre. De là vient qu’il dit : « Je vous donnerai toutes ces choses (Matth. IV, 9). » Quant au lion, il est manifeste qu’il ne fait entendre ses rugissements épouvantables qu’à la porte de ceux qui sont déjà dans la crainte. L’aspic observe ceux qui sont dans la tristesse, parce que cette passion lui donne la facilité qu’il demande pour faire ses morsures. Aussi ne s’approcha-t-il de Notre Seigneur que lorsqu’il le vit avoir faim. Enfin, il faut que ceux qui se laissent aller à la joie craignent les regards du basilic, parce que c’est par la joie que l’on donne entrée aux regards envenimés de ses yeux. Et la vaine gloire ne nous blesse et n’entre dans notre cœur que lorsque nous nous laissons aller à la vaine joie.

10. Considérons maintenant si nous pouvons opposer quatre vertus à ces quatre tentations. Le lion rugit : qui est-ce qui ne craindra pas ? Ce sera l’homme fort et courageux. Mais après avoir échappé, au lion, le dragon se cache, dans le sable pour attirer l’âme par son haleine empoisonnée en lui, inspirant comme par son souffle, le désir des choses de la terre. Qui sera celui qui évitera, ses embûches ? Ce ne sera que l’homme prudent. Mais peut-être, pendant que vous êtes sur vos gardes pour ne pas tomber dans les pièges de l’ennemi, vous vous trouvez en butte à quelque fâcheux traitement de la part des hommes, aussitôt l’aspic se présente, s’imaginant avoir trouvé le moment favorable. Qui est-ce qui ne se sent point blessé par cet aspic ? Ce sera seulement l’homme d’un esprit égal et modéré, qui sait être le même dans l’abondance comme dans la disette. Quand vous aurez ainsi, heureusement, échappé à tous les périls, l’ennemi prendra encore occasion de vos succès, pour vous flatter et vous entraîner dans la vanité par des regards pervers. Qui se détournera des regards du basilic ? Ce sera le juste, qui, par sa justice et son équité, non-seulement ne voudra pas usurper la gloire qui appartient à Dieu, mais ne voudra pas même recevoir celle qui lui sera offerte par les autres hommes. Mais il, faut pour cela que ce juste soit tel qu’il accomplisse avec justice toutes les choses qui sont justes, qu’il ne fasse point ses bonnes œuvres devant les hommes pour en recevoir des témoignages, et qu’enfin il ne s’élève jamais par aucune présomption, quelque justice qu’il ait en lui-même. Car cette vertu consiste principalement dans l’humilité. Elle rend l’intention pure, et son mérite est d’autant plus véritable et plus efficace qu’elle est plus éloignée de se l’attribuer.

Texte intégral – Saint Bernard – Dix-sept sermons sur le psaume 90
- Quatorzième sermon


Solennités en mai

Cette page indique uniquement les Solennités et autres fêtes ou particularités du mois.
En dehors de ces jours, consulter les Horaires Messes et Offices

SAMEDI 14 MAI – Saint Matthias – Mémoire

– 11h00 : Messe pour la Paix
– 14h00 : None
– 14h15 à 17h00 : Adoration
– 17h15 : Vêpres

JEUDI 26 MAI – Solennité de l’Ascension du Seigneur

– 10h00 : Messe

MARDI 31 MAI – Visitation de la Vierge Marie – Solennité

– 10h00 : Messe

N.B. – tous les lundis, jour de désert, messe lue, vêpres à 18h

Calendrier du mois : Messes-Mai-2022   


Avril – Psaume 90 – 13

Mois d’avril

Ecoutons Saint Bernard – Sermon 13 sur le psaume 90

TREIZIÈME SERMON. « Ils vous porteront entre leurs mains, de peur que votre pied ne heurte contre quelque pierre (Psal. XC, 12). »

1. Navril2022-400ous pouvons entendre le verset : « Ils vous porteront dans leurs mains, » non-seulement des consolations et des assistances présentes, mais aussi de celles de l’avenir. Il. est certain. que les saints anges nous gardent dans nos voies durant le cours de cette vie; mais lorsque notre voyage sera fini, c’est-à-dire, lorsque nous sortirons de cette vie, ils nous porteront entre leurs mains. Et nous ne manquons pas de témoignages à l’appui de ce que je vous dis. Il n’y a pas longtemps vous avez entendu dire que notre bienheureux père saint Benoît, paraissant avoir les yeux attentifs à regarder l’éclat d’une brillante lumière, vit l’âme de saint Germain (a) évêque de Capoue portée au ciel par les anges dans un globe de feu. Mais qu’avons-nous besoin de ce genre de témoignages ? celui qui est la vérité même n’a-t-il pas dit, dans l’Évangile, que ce pauvre qui était couvert d’ulcères « fut porté par les anges dans le sein d’Abraham (Luc. XVI, 22). » Nous ne pourrions de nous-mêmes marcher dans une voie si nouvelle et si inconnue, d’autant plus qu’il se trouve au milieu une si grande pierre d’achoppement à craindre. De quelle pierre parlé-je ? C’est de celui qui était autrefois adoré dans des pierres, et qui présenta des pierres à Notre-Seigneur, en lui disant : «Ordonnez que ces pierres deviennent du pain (Matt. IV, 3). » Or, votre pied, ce sont vos affections et vos passions. Voilà ce pied de l’âme que les anges portent entre leurs mains, de crainte que vous ne le heurtiez et ne le blessiez contre la pierre. Car comment ne serait-elle pas extrêmement troublée si elle sortait toute seule de cette vie pour entrer dans ces voies et marcher seule parmi les pierres de scandale, et de ruine que l’ennemi lui présentera ?

a Ce passage nous fait connaître que ce sermon a été prononcé peu de temps après la fête de saint Benoît, dont saint Grégoire rapporte ce trait dans son livre II, des Dialogues, chapitre 35.

2. Mais il faut que je vous explique encore plus clairement combien il vous est nécessaire d’être portés par les mains des anges. » Vous marcherez sur l’aspic et sur le basilic, et vous foulerez aux pieds le lion et le dragon. » Quel serait le désordre et le trouble de votre âme au milieu de ces monstres terribles ? Ce qu’il faut entendre par là, n’est autre chose que les mauvais esprits parfaitement figurés par ces monstres horribles. C’est de ces esprits cruels et méchants, vous ne l’avez pas oublié, je pense, qu’il est dit plus haut : « Il en tombera mille à votre main droite.» Mais qui peut savoir si les œuvres de malice et les ministères d’iniquité sont divisés et partagés entre ces esprits, en sorte que ces divers offices, par lesquels ils exercent différemment leur méchanceté sur les hommes, doivent être signifiés et représentés par les divers noms et par les différentes propriétés de ces bêtes? L’un par l’aspic, l’autre par le basilic, celui-ci par le lion, celui-là par le dragon, parce que chacun d’eux nuit à sa manière par des mesures cruelles ; l’autre par de simples regards, celui-ci en renaissant et en frappant, celui-là, par son souffle de son haleine. Nous lisons dans l’Evangile, qu’il y a un certain genre de démons, qu’on ne saurait chasser que par la prière et le jeûne (Matt. XVI, 20). Les apôtres n’avaient aucune puissance, par leurs paroles, sur ces sortes de démons. N’étaient-ce pas des aspics (Psal. LVII, 5); car il y est dit dans un psaume que ce serpent est sourd, et qu’il bouche ses oreilles pour ne pas entendre la voix de l’enchanteur ? Voulez-vous marcher en sûreté, après votre mort sur les aspics ? Prenez garde, durant cette vie, de ne point marcher après eux. Ne les imitez pas, vous n’aurez point sujet de les craindre plus tard.

3. Il y a des vices particuliers sur lesquels, je pense, dominent ces sortes de démons ; je crois que ces vices sont ce mouvement circulaire dont je vous ai parlé hier, en vous disant de vous en garder soigneusement, et cette obstination contre laquelle je vous ai prémunis avant-hier ; je suis bien aise de vous en parler encore, et toutes les fois que les occasions s’en présenteront, je ne négligerai point de vous suggérer tous les moyens en mon pouvoir de fuir cette peste pernicieuse de l’âme et de vous en garantir. On peut dire, en un mot, que cette obstination est la ruine de toute religion : c’est véritablement comme parle Moïse, « un venin d’aspic incurable (Deut. XXXII, 33). » On dit que l’aspic appuie une de ses oreilles le plus fort qu’i! peut contre la terre, et bouche l’autre avec sa queue, afin de ne point entendre les paroles de l’enchanteur. Que peut donc sur lui, la voix des enchanteurs Évangéliques ? Que peut la parole de ceux qui lui annoncent les vérités chrétiennes ? Que ferai-je donc pour gagner un aspic comme celui-là ? Je me mettrai en prière pour lui, pour lui, j’humilierai mon âme, par le jeûne. Je me baptiserai pour ce mort, par l’épanchement abondant de mes larmes, quand je verrai que les enchantements humains les plus sages, et les avis les plus convenables auront échoué contre son obstination. Que l’homme indocile et opiniâtre considère que ce n’est pas vers le ciel qu’il élève sa tête ; mais que c’est sur la terre qu’il la tient attachée, puisque la sagesse qui vient du ciel non-seulement est modeste, mais ne produit dans le cœur que paix et docilité ; leur prudence est celle des aspics ; elle est terrestre et animale. Mais cet aspic ne serait pas sourd comme il l’est, s’il ne bouchait encore une de ses oreilles avec sa queue. Or, que signifie cette queue ? C’est la fin à laquelle on se propose d’arriver. La surdité d’un homme qui se tient comme serré contre terre, c’est-à-dire qui s’attache à sa propre volonté, et qui comme l’aspic replie sa queue pour se boucher une oreille, c’est-à-dire, forme dans son esprit quelque dessein et met dans son cœur un objet qu’il désire d’obtenir, est une surdité désespérée. Je vous en conjure donc, mes frères, ne bouchez point vos oreilles, n’endurcissez jamais vos cœurs. Car c’est cet endurcissement et cette surdité volontaire qui fait sortir de la bouche d’un homme opiniâtre tant de paroles injurieuses et amères, parce que, en cet état, il est inaccessible et impénétrable à tous les témoignages de bienveillance qu’on lui peut donner, en l’avertissant de son devoir. C’est parce qu’il s’est endurci avec tant de soin contre la voix du saint enchanteur de son âme, que sa langue, semblable à un dard, demeure toujours pleine du venin de l’aspic.

4. Quant au basilic, ou dit qu’il porte son venin dans les yeux ; c’est l’animal le plus méchant et le plus à craindre. Voulez-vous savoir ce que c’est qu’un œil envenimé, un œil méchant, un œil capable d’empoisonner et de tuer par ses regards ? Représentez-vous ce que c’est que l’envie. Qu’est-ce qu’envier, sinon regarder avec un œil mauvais ? Si le démon n’avait point été un basilic, jamais la mort ne serait entrée sur la terre par l’envie de cet ennemi ? Malheur à l’homme de n’avoir point prévu la méchanceté de cet envieux ! Garantissons-nous, pendant que nous sommes sur la terre, des atteintes du vice odieux de l’envie, si nous voulons, après notre mort, n’avoir pas à craindre qu’il exerce contre nous sa haine détestable. Que personne de nous ne regarde jamais le bien qui est dans son prochain avec des yeux d’envie ; car le regarder de cette sorte, c’est (autant qu’on en a le pouvoir) l’infecter et le corrompre, et en quelque façon le détruire. La vérité même nous dit que celui qui hait un homme est un homicide ( I Joan. III, 15). Que dirons-nous, de celui qui hait le bien qui se rencontre dans son prochain ? Ne peut-on point avec plus de raison encore le traiter d’homicide ? A la vérité, la personne qui est l’objet de son envie est encore vivante, mais l’envieux ne laisse pas d’être coupable de sa mort, par la mauvaise disposition de son cœur. Le feu que Notre Seigneur Jésus-Christ est venu apporter sur la terre est encore, allumé, et l’homme qui est plein d’envie contre soit frère mérite autant d’être condamné, que s’il éteignait ce feu de la charité du Sauveur du monde.

5. Redoutez aussi les atteintes du dragon. C’est une bête cruelle. Son souffle brillant tue tout ce qu’il touche. Non-seulement il fait mourir les bêtes de la terre, mais encore les oiseaux du ciel. Pour moi, ce dragon n’est autre chose que la passion de la colère. Combien, au souffle de ce monstre, et brûlés misérablement par son haleine, sont tombés d’hommes dont la vie semblait si élevée, et dont la chute a été honteuse. Combien auraient-ils mieux fait de se fâcher contre eux-mêmes pour ne point pécher ! A la vérité, la colère est une passion naturelle aux hommes, mais ceux qui abusent des biens de la nature seront sévèrement punis, et périront misérablement. Prévenons cette passion, mes frères, dans les rencontres où il nous est important de la prévenir, de crainte qu’elle ne nous emporte à des actions inutiles, et défendons, comme on a coutume de réprimer, l’amour par l’amour et la crainte par une autre crainte. « Ne craignez point ceux qui font mourir le corps, dit Notre-Seigneur, et qui n’ont aucun pouvoir de nuire à vos âmes. » Et, continue-t-il aussitôt : « Je vais vous indiquer qui vous devez craindre. Craignez celui qui a la puissance de jeter vos âmes dans les tourments éternels. Je vous le répète, c’est celui-là que vous devez craindre. (Luc. XII, 4). » Comme si Notre Sauveur avait voulu dire par ces paroles : Craignez celui-là pour ne point craindre les autres. Que l’esprit de la crainte du Seigneur vous remplisse, et une crainte étrangère et illégitime n’aura point de place dans vos cœurs. Je vous le dis donc, aussi, avec assurance, ou plutôt ce n’est pas moi, c’est la vérité même, c’est le Seigneur qui vous le dit : Ne vous mettez point en colère contre ceux qui vous ôtent les biens passagers, qui vous couvrent d’outrages, qui, peut-être, vous font souffrir mille maux, et qui ne peuvent plus, après cela, rien faire contre vous. Je vais vous montrer contre qui vous devez exercer votre colère. Mettez-vous en colère contre une chose qui seule est capable de vous nuire, et de faire que tout ce que vous souffrez ne vous profite en aucune sorte. Voulez-vous savoir de quelle chose je parle ? C’est de votre propre iniquité ; car nulle adversité ne vous pourra nuire si nulle iniquité ne domine en vous. Celui qui ressent une sainte colère contre cet ennemi, embrasse les épreuves au lieu d’en être troublé. « Je suis préparé, dit le Prophète, à tous les fléaux qui me peuvent arriver. (Psal. XXXVII, 18).» Dommages, injures, blessures mêmes, je suis préparé à tout souffrir, je n’en suis nullement troublé, parce que la douleur de mes péchés m’est constamment présente. Pourquoi ne mépriserai-je pas toutes les affections extérieures, en comparaison de cette douleur intérieure de mon âme ? « Pendant que mon propre fils me persécute, dit le roi Prophète, me fâcherai-je contre un serviteur qui me dit des injures ( II Reg. XLI, 11)? » Quand je me vois abandonné par mon propre cœur, privé de toute vertu et de la lumière qui éclairait mes yeux, pleurerai-je quelques pertes temporelles et m’inquiéterai-je des incommodités qui ne regardent que le corps ?

6. Quand on est dans cette disposition, non-seulement on s’établit dans une patience et une douceur à laquelle le souffle du dragon ne saurait nuire, mais il se forme encore dans le cœur une magnanimité que les rugissements du lion ne sauraient épouvanter. Notre adversaire, dit saint Pierre, est comme un lion rugissant. (I Petr. V, 8). Grâce au lion victorieux et divin de la tribu de Juda, ce lion rugissant et furieux ne nous saurait dévorer. Il ne peut nous faire de mal quand il ne cesserait de rugir. Qu’il rugisse donc tant qu’il voudra, les brebis de Jésus-Christ n’ont qu’à ne point fuir, et à demeurer fermes. Que de menaces ne fait-il point ? Que de périls et de maux n’accumule-t-il point, afin de nous épouvanter ? Mais n’imitons pas les bêtes fauves, et que ce rugissement, qui n’est qu’un vain bruit, ne puisse jamais nous abattre. Car ceux qui ont examiné ces choses avec beaucoup de soin rapportent que nulle bête n’est assez hardie pour demeurer ferme quand elle entend le rugissement du lion, pas même celles qui résistent avec le plus de force et de courage contre ses attaques, et qu’il arrive souvent qu’une bête qui ne peut résister au rugissement du lion ne laisserait pas de le vaincre lorsqu’elle en est attaquée. C’est ressembler à ces bêtes, c’est être privé de raison que d’être assez privé de courage, et assez faible pour se laisser vaincre par la seule crainte, et de se laisser tellement abattre par la seule pensée d’une peine qui n’est pas encore arrivée, que d’être vaincu avant de combattre, non par les coups de l’ennemi, mais par le seul bruit de la trompette. «Vous n’avez pas encore résisté jusques au sang, disait ce chef si généreux qui connaissait combien était vain le rugissement de ce lion (Hebr. XII, 4). » Et un autre apôtre nous dit : « Résistez au diable, et il s’enfuira loin de vous. (Jacob. V, 7). »

Texte intégral – Saint Bernard – Dix-sept sermons sur le psaume 90
- Treizième sermon


Solennités en avril

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SAMEDI 9 AVRIL – Férie

– 11h00 : Messe pour la Paix
– 14h00 : None
– 14h15 à 17h00 : Adoration
– 17h15 : Vêpres

DIMANCHE 10 AVRIL – Dimanche des Rameaux et de la Passion

– 10h00 : Messe

JEUDI 14 AVRIL – Jeudi Saint

– 17h00 : Messe et Procession au Reposoir

VENDREDI 15 AVRIL – Vendredi Saint

– 15h00 : Célébration de la Passion du Seigneur

SAMEDI 16 AVRIL – Samedi Saint

– 22h00 : Vigile Pascale

DIMANCHE 17 AVRIL – Dimanche de Pâques

– 10h00 : Messe

LUNDI 18 AVRIL – Lundi de Pâques

Horaire du dimanche, messe à 10h

SAMEDI 30 AVRIL – Férie

– 11h00 : Messe

N.B. – tous les lundis (sauf le 18) + mardi 19, jour de désert, messe lue, vêpres à 18h

Calendrier du mois : Messes-Avril-2022