Juillet – Saint Benoit
Mois de Juillet
Dans la foi et la douceur
Suivons le chemin de sainteté
Chemin tracé par Moïse et Benoît
Ecoutons Guerric d’Igny dans son sermon 4 pour la Saint Benoît (11 juillet)
« Dans la foi et la douceur, Dieu en fit un saint. » Ces paroles ont été écrites de Moïse, mais aujourd’hui, ce n’est pas mal à propos, je pense, qu’on les applique au bienheureux Benoît : s’il fut rempli de l’esprit de tous les saints, il participa surtout, croyons-le, et dans une large mesure, à l’esprit de Moïse.
Celui-là fut à la tête de ceux qui sortirent d’Égypte, celui-ci de ceux qui renoncent au siècle. Celui-là fut un législateur, celui-ci le fut aussi. Celui-là ministre de la Loi qui tue, celui-ci de l’esprit qui vivifie. Celui-là, guide des enfants d’Israël qu’il fit sortir d’Égypte, sans pourtant les introduire dans le repos promis ; notre guide sur la voie droite, le chemin de l’Orient, nous a précédés aujourd’hui au Royaume des cieux, comme porte-drapeau de l’armée des moines. Aussi ne paraîtra-t-il pas mal à propos d’appliquer à Benoît ce qui fut écrit de Moïse : « Dans la foi et la douceur, il en fit un saint. » D’autant que ce sont surtout ces deux vertus, la foi et la douceur, que nous apprend ce maître qui jamais ne vécut autrement qu’il enseigna.
Qu’y a-t-il, en effet, de plus éclatant que la foi de celui qui, encore adolescent, dédaigneux du monde qui lui souriait, foula aux pieds aussi bien le monde que sa chair, comme s’ils étaient déjà fanés bien qu’ils fussent en leur fleur ? Il désirait plutôt souffrir pour Dieu les maux de ce monde, que d’y jouir d’une réussite éphémère. Et quoi de plus saint que la douceur de notre Père, qui ne put être altérée par la méchanceté des faux frères qui en voulaient à sa vie, lui présentant du poison au lieu de vin ? L’Écriture dit bien de Moïse, qu’il fut le plus doux des hommes sur la terre ; ne dit-elle pas pourtant que son esprit s’emporta ? Ne rappelle-t-elle pas qu’il s’irrita, et s’irrita violemment contre ceux qui s’opposaient à lui ? Quant à la douceur de notre Maître, non seulement elle fut admirable envers les médisants, mais aussi envers les malfaisants ; je ne me rappelle pas qu’il fût pour lui question de colère.
C’est « dans la foi et la douceur » que vous aussi, frères, vous serez saints. Et votre douceur sera sans équivoque si la foi la précède ; du moins s’il s’agit d’une foi non pas menteuse, mais véritable, non pas morte, mais vive et vivante. Car le moyen de compter pour rien les biens temporels, c’est de fixer les yeux sur les biens éternels ; le moyen de mépriser facilement la puissance des hommes, c’est de craindre comme toujours menaçante la puissance de Dieu. Double attitude qui résulte de la seule foi. Celle-ci a les yeux si vifs et si pénétrants qu’elle porte avec acuité son regard sur les réalités à venir, tandis qu’elle fixe avec perspicacité sa vue sur les réalités présentes, quoique cachées. Éclairée, comme elle l’est, de l’Esprit éternel, la foi ne peut pâtir ni de la longueur du temps, ni de l’opacité des corps ; elle peut à la fois anticiper le temps et saisir d’avance l’avenir, dépasser les corps pour contempler le spirituel.
Veillez donc, frères, tenez-vous fermes dans la foi. Lorsque la foi nous provoque à la crainte, on ne peut s’endormir par négligence ; lorsque la foi nous enracine dans l’espérance, on ne peut chanceler par défiance. Mais faites toutes vos actions dans la charité, de sorte que la douceur se joigne à la foi et que l’on dise de chacun d’entre vous : « Dans sa foi et la douceur, le Seigneur en a fait un saint. »
Bienheureux Guerric d’Igny – Sermon 4 pour la Saint Benoît – 1-3, 6 – Extraits
Texte intégral
Qui est Guerric d’Igny – Abbé cistercien (vers 1080 – 1157)
La naissance de Guerric se situe entre 1070 et 1080 à Tournai, donc 10 à 20 ans avant celle de Bernard. Il reçoit son éducation à l’école cathédrale de Tournai : humanité, dialectique et théologie, ce qui lui vaudra un talent d’écrivain bien formé et développé. Sans doute bénéficiera-t-il de l’enseignement d’un maître fameux, Odon de Cambrai. Sans doute aussi sera-t-il chanoine de la cathédrale et chargé de l’école cathédrale. Mais, en 1116, il décide de mener la vie érémitique et se retire dans une petite maison, à proximité de l’église. Il entend parler de saint Bernard par deux de ses amis et visite Clairvaux en 1120, sans avoir l’intention d’y rester. Mais Bernard qui reconnaît en lui l’étoffe d’un bon moine, le presse d’entrer. Le voici novice à Clairvaux, un novice plus âgé que son abbé, et sur le plan humain, doté de plus d’expérience et de maturité. Guerric reste 13 ans à Clairvaux, période qui coïncide avec le plein épanouissement des dons de Bernard et sa meilleure production littéraire. Puis vers 1138, il est envoyé à Igny, en Champagne, qui a été fondée en 1128, et il en devient abbé. Il a environ 60 ans. Sa mauvaise santé le rend incapable de mener la vie commune et de prendre sa part du travail manuel. Il le regrette, car il voit dans cette observance du travail des mains une des voies où l’on rencontre Jésus. Sous l’abbatiat de Guerric, Igny prospère, les vocations arrivent nombreuses. Pourtant c’est uniquement à son œuvre, à ses sermons que sera due l’influence postérieure de Guerric qui meurt en 1157. Nous n’avons de Guerric que le recueil de ses sermons. Tous, sauf le dernier, ont pour sujet les fêtes de l’année liturgique. Guerric y insiste sur les mystères liturgiques et sur la formation du Christ en l’âme de ceux qui y participent. En maints endroits, il reprend l’idée origénienne de la conception et de la naissance du Christ en l’âme. En recevant les sacrements et en imitant le Seigneur, nous le faisons naître en nous. L’âme devient alors « Mère du Christ », et Celui-ci nous donne la vraie vie en communiquant l’Esprit qui procède du Père et de lui.
Voir également la page « Quelques auteurs cisterciens »