Octobre – Aimer à la mesure…
Mois d’octobre
« Aimer à la mesure de notre faiblesse »
et aussi
« C’est mon Père qui vous donne le vrai pain descendu du ciel »
Ecoutons Baudouin de Ford – Abbé cistercien – Le Sacrement de l’Autel (extraits)
« Aimer à la mesure de notre faiblesse »
Si, en effet, nous ne sommes pas capables de diriger vers Dieu toutes nos pensées, toutes nos affections et intentions, aussi chastement et purement qu’il serait juste et digne, pour l’aimer « de tout notre cœur, de toute notre âme, de tout notre esprit », mieux vaut du moins l’aimer selon la petite mesure de notre faiblesse que ne pas l’aimer du tout. Et si nous ne pouvons offrir à Dieu des prières aussi pures que nous les désirerions, mieux vaut prier comme nous pouvons que ne pas prier du tout. Donc, quand la perfection nous est prescrite, gardons-nous de ne rien faire sous prétexte que nous ne pouvons pas tout faire; mais infléchissons la perfection à ce que nous pouvons, et nous serons en quelque manière excusés quant à ce que nous devions faire et ne pouvons pas faire. Comme le Seigneur l’a dit de cette femme qui avait répandu son parfum sur sa tête : « Elle a fait ce qu’elle a pu . » Tous les conseils qui nous sont proposés dans les paroles de Dieu doivent donc être pris et compris de telle manière qu’ils tournent à l’avantage de notre salut éternel et de celui de nos frères.
Le Sacrement de l’Autel, t. II, SC n° 94, p. 549-551
« C’est mon Père qui vous donne le vrai pain descendu du ciel. »
Dieu, dont la nature est bonté, dont la substance est amour, dont toute la vie est bienveillance, voulant nous montrer la douceur de sa nature et la tendresse qu’il a pour ses enfants, a envoyé dans le monde son Fils, le pain des anges (Ps 77,25), « à cause de l’amour extrême dont il nous a aimés » (Ép 2,4). « Car Dieu a aimé le monde au point de donner son Fils unique » (Jn 3,16).
Telle est la manne véritable que le Seigneur a fait pleuvoir pour qu’on la mange…; c’est ce que Dieu, dans sa bonté, a préparé pour ses pauvres (Ps 67,9s). Car le Christ, descendu pour tous les hommes et jusqu’au niveau de chacun, attire tout à lui par sa bonté indicible ; il ne rejette personne et admet tous les hommes à la pénitence. Il a pour tous ceux qui le reçoivent le goût le plus délicieux. Lui seul suffit à combler tous les désirs…, et il s’adapte de manière différente aux uns et aux autres, selon les tendances, les désirs et les appétits de chacun…
Chacun goûte en lui une saveur différente… Car il n’a pas la même saveur pour le pénitent et le commençant, pour celui qui avance et celui qui touche au but. Il n’a pas le même goût dans la vie active et dans la vie contemplative, ni pour celui qui use de ce monde et pour celui qui n’en use pas, pour le célibataire et l’homme marié, pour celui qui jeûne et fait une distinction entre les jours et pour celui qui les estime tous semblables (Rm 14,5)… Cette manne a une douce saveur parce qu’elle délivre des soucis, guérit les maladies, adoucit les épreuves, seconde les efforts et affermit l’espérance… Ceux qui l’ont goûté « ont encore faim » (Eccl 24,29) ; ceux qui ont faim seront rassasiés.
Le Sacrement de l’autel III, 2 ; PL 204, 768-769 (trad. Orval ; cf SC 94, p.565)
Qui est Baudouin de Ford
HOMME MODESTE «Né de famille pauvre, maigre et petit de taille, modeste, sobre et de grande abstinence, parlant peu, lent à la colère, il se montrait de nature généreuse.» Tel est le portrait de Baudoin fait par un compagnon de voyage, Giraud le Cambrien. Fait archidiacre en 1161, son amour du silence et de la vie contemplative le fit entrer à l’Abbaye de Ford en 1169. Il en devint l’Abbé en 1175.
PRIMAT DE L’ÉGLISE D’ANGLETERRE En raison de sa grande culture, il fut élu évêque de Worcester en 1180 puis archevêque de Cantorbéry et primat d’Angleterre en 1184. Il accompagna Richard 1er Coeur de Lion lors de la 3e Croisade, où il perdit la vie à Tyr en 1190. Son amour des lettres fait de lui un grand écrivain cistercien connu pour ses Traités et Sermons, et surtout pour ses ouvrages Le Sacrement de l’Autel et L’Éloge de la foi. De ses seize petits traités, le plus célèbre est celui sur la vie commune.
Fondée vers 1133, l’Abbaye de Ford était un haut lieu de vie intellectuelle et spirituelle dans le sud de l’Angleterre, comparable à l’Abbaye de Rievaulx au nord. Fermée en 1539 par le décret de dissolution des monastères promulgué par Henri VIII, l’Abbaye est maintenant une grandiose résidence privée. Ses impressionnants jardins sont ouverts au public.