Novembre – Visage de Dieu

Mois de novembre

« Le Ciel

Fête du Visage de Dieu » 

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Ecoutons Guillaume de Saint Thierry

J’entends dire qu’au ciel les maux que nous souffrons ici-bas n’existent plus : là-haut plus de matins ni de soirs ; ces matins où la joie passe fugitive ; ces soirs où au contraire les larmes n’en finissent plus de couler. Ah ! Si c’en était fini, quelles délices pour moi, tu le sais ! Non là-haut il n’y a plus que le jour, un jour où l’on fête sans arrêt la gloire de ta vision, où rien de ce qui pourrait troubler la fête de ton visage ne peut avoir accès. Feu, neige, grêle, ouragans de tempête, à ce que j’entends dire, ne peuvent monter jusque là-haut, tandis que, sur nous, pour obéir à ta parole, ils tombent dru pour nous affliger. Là, ni mort, ni corruption des corps ou des âmes, la peste des troubles est à jamais bannie ; ce n’est que la parfaite harmonie dans la vertu, la félicité, la joie, l’amour de toi qui jouit de son bien, sans la moindre crainte de le perdre à jamais.

J’entends parler de ce jour de fête qu’enchantent les jubilations et les concerts des anges, qu’emplissent de gloire les couronnes des apôtres et des martyrs, où se trouvent, réunis en une seule assemblée, tous ces justes qui, depuis les débuts du monde, t’ont été agréables ; pour toujours ils ont fixé leur demeure au sein de cette fête éternelle. S’il suffit d’en voir deux ou trois réunis en ton nom sur cette terre, et toi au milieu d’eux, pour constater le charme de cette cohabitation, pour la sentir tout imprégnée du parfum de l’Esprit-Saint, – si bien qu’il devient évident pour tous que le Seigneur a répandu en ce lieu sa bénédiction – que dire de celui où tu as réuni tous les saints qui ont placé ton alliance au-dessus des
sacrifices et qui, devenus comme des cieux, annoncent ta justice ?

Guillaume de Saint Thierry – Oraisons méditées, 6 (extraits)

Qui est Guillaume de Saint Thierry – Théologien et philosophe

Né à Liège vers 1085, Guillaume quitte son pays pour faire ses études, sans doute à Laon. Puis il prend l’habit monastique dans l’abbaye bénédictine de Saint Nicaise de Reims, alors en pleine ferveur. Il devient ensuite abbé du monastère bénédictin de Saint-Thierry, près de Reims, vers 1121. Il avait fait la connaissance de Bernard quelques années auparavant ; celui-ci l’avait conquis, et Guillaume désirait devenir cistercien. Bernard qui trouve ce projet trop peu mûri, s’oppose à ce que son ami entre à Clairvaux. Plusieurs années après, en 1135 passant outre aux conseils de Bernard, Guillaume rejoint la jeune fondation cistercienne de Signy, le monastère de saint Bernard le plus proche de Reims, où il demeurera jusqu’à sa mort en 1148.

Ce séjour à Signy est fécond : Guillaume écrit beaucoup : « Commentaire du Cantique » dont il avait dû parler avec Bernard quand ils étaient tous deux malades à Clairvaux, « Enigme de la foi », et surtout la « Lettre d’Or », dédiée aux frères chartreux du Mont-Dieu, qui est un condensé de sa doctrine.

Excellent théologien et philosophe, Guillaume est aussi un grand mystique. Pour lui, le dogme est matière à contemplation, non à spéculation. Il est nourri des écrits des Pères de l’Eglise, et très sensibles à ce qu’ils ont de concordant. C’est un des auteurs occidental qui a le mieux perçu en profondeur la pensée d’Origène.

Moine avant tout, il contribue plus qu’un autre à la théologie de l’expérience de Dieu, fondée sur la foi, dont l’objet ne peut être atteint que par l’amour. C’est l’Esprit-Saint, union du Père et du Fils, qui communique à l’âme cet amour réciproque du Père et du Fils, et ainsi qui la divinise, la rendant semblable aux Personnes divines. Cette mystique trinitaire est l’apport le plus original et le plus riche de la pensée de Guillaume.

Source Abbaye Notre-Dame de Cîteaux