Août – Prendre du temps…
Mois de août
PRENDRE DU TEMPS POUR SOI ?
« On ne doit point s’occuper des autres au point de se négliger soi-même. »
Ecoutons Saint Bernard – « De la considération » – Livre premier – chapitre 5
Ce n’est pas un luxe, mais une nécessité. Saint-Bernard exhorte le pape Eugène III, et tous ceux qui risquent de se laisser submerger par leur service du prochain.
« Venez à l’écart et reposez-vous un peu » (Mc 6,31)
« Si tout ce qui fait ta vie et ta sagesse, tu les donnes à l’action, sans rien préserver à la réflexion et la méditation, vais-je te louer ? Non, en cela je ne te louerai pas. Et il ne se trouvera personne, je pense, pour le faire, s’il a entendu cette parole de Salomon : qui limite son action acquerra la sagesse. Et assurément, l’action elle-même a besoin d’être précédée par la réflexion.
Par ailleurs, si tu veux être tout entier à tous, à l’exemple de celui qui s’est fait tout à tous, je loue ton humanité, mais à condition qu’elle soit pleine et totale ? Or, comment le serait-elle, si tu t’en exclus ? Toi aussi tu es homme. Donc, pour que ton humanité soit pleine et entière, il faut qu’elle t’inclue, toi aussi, dans cette ouverture du cœur que tu réserves à tous. Autrement, que te sert-il comme disait le Seigneur, de gagner l’ensemble des hommes, si toi, tu te perds ? Ainsi, puisque tu es le bien de tous, sois toi-même l’un de ceux qui te possèdent ? Pourquoi serais-tu le seul à être privé de cette faveur ? Jusqu’à quand ton esprit va-t-il s’éloigner sans revenir à toi ? Jusqu’à quand vas-tu négliger de te recevoir toi-même, à ton tour, parmi ceux qui se présentent ?
Tu te dois aux sages et aux ignorants, et à toi, tu te refuserais ? le fou et le sage, le serf et l’homme libre, le riche et le pauvre, l’homme et la femme, le vieillard et l’adolescent, le clerc et le laïc, le juste et l’impie : tous pareillement se partagent ta vie, tous comme à une fontaine publique, puisent à ton cœur, et toi, tu te tiendrais à part, mourant de soif. Si l’on déclara maudit celui qui se fait la part la plus mauvaise, que dire de celui qui s’exclut totalement du partage. Oui, que tes eaux se répandent sur les places, que les hommes et le bétail s’y désaltèrent ; verse à boire même aux chameaux du serviteur d’Abraham.
Mais parmi eux tous, bois, toi aussi, à l’eau jaillissante de ton puits. C’est l’étranger qui ne doit pas en boire, comme il est écrit. Serais-tu donc un étranger ? A qui ne seras-tu pas étranger, si tu l’es à toi-même ? Qui se traite moins que rien, envers qui sera-t-il bon ? Souviens-toi donc, je ne te dis pas toujours, je ne dis pas même souvent, mais au moins de temps en temps, de te rendre toi-même à toi. Parmi beaucoup d’autres, ou même après beaucoup d’autres, recours à tes services.
Texte intégral – Saint Bernard – DE LA CONSIDERATION – Livre premier – Chapitre 5 (extraits)
- Chapitre 5