Septembre – Ps 90 – 17
Mois de septembre
Ecoutons Saint Bernard – Sermon 17 sur le psaume 90
DIX-SEPTIÈME SERMON. « Je le comblerai de jours et d’années, et je lui ferai part du salut que je destine à mes saints (Psal. XC, 16).»
1. Ce verset, mes frères, convient parfaitement au saint temps où nous sommes. Sur le point de célébrer la fête de la résurrection de Notre-Seigneur, nous attendons la promesse qui nous est faite de participer à cette résurrection si glorieuse : il nous invite en qualité de membres de Jésus-Christ, à célébrer avec solennité la mémoire de ce qui est arrivé à notre chef, en considérant que nous devons un jour avoir part à la même gloire. Que ce psaume finit bien, puisqu’il promet à ceux qui le chantent une fin si heureuse ! Ce verset termine le psaume d’une manière qui doit nous remplir de joie, puisqu’il nous promet de nous combler de tous les biens. « Je le comblerai de jours et d’années : et je lui ferai part du salut que je destine à mes saints (I Tim. IV, 8). » Je vous ai dit bien souvent, mes frères, que la piété, selon la doctrine de Saint-Paul, a les promesses de la vie présente aussi bien que de la vie future. C’est pourquoi cet apôtre dit encore : « Vous verrez dès maintenant le fruit de votre fidélité, en obtenant la sanctification de vos âmes et, pour l’avenir, vous obtiendrez la vie éternelle. » Voilà ce que signifient cette plénitude et cette longueur de jours et d’années qui nous sont promises dans ce verset. Qu’y a-t-il, en effet, de plus long que ce qui est éternel ? Qu’y a-t-il de plus long que ce qui ne doit jamais finir ? C’est une heureuse fin que la vie éternelle ? C’est une heureuse fin que celle qui ne doit jamais avoir de fin ? Il n’y a que ce qui est bien qui soit une bonne fin. Travaillons donc de tout notre cœur à notre sanctification, puisque c’est en elle seulement que consiste le bien, et qu’elle doit être couronnée par une vie qui ne doit jamais finir. Ne pensons qu’à obtenir cette paix du cœur et cette sainteté, sans laquelle personne ne verra Dieu. Le Seigneur dit donc : « Je le comblerai de jours et d’années, et je lui ferai part du salut que je destine à mes saints (Hebr. XII, 14). » C’est une promesse de la droite de Dieu. C’est un don de cette droite qu’un saint souhaitait jadis que Dieu lui tendit, quand il disait : « Vous tendrez, Seigneur, votre droite à l’œuvre de vos mains (Job XIV, 15). » C’est cette droite qui nous doit combler d’éternelles délices. Voilà ce qu’il a désiré et obtenu celui dont le Psalmiste a dit : « Il vous a demandé la vie, et vous lui avez accordé une longueur de jours pour un siècle et pour les siècles des siècles (Psal. XX, 5). » Le Sage s’explique encore plus clairement lorsqu’il dit : « Les richesses et la gloire sont dans sa main gauche, et la longueur des jours est dans sa main droite (Prov. III, 16). » Qui est l’homme qui veut véritablement la vie et qui souhaite de voir d’heureux jours ? Or, la vie présente est plutôt une mort qu’une vie, ou du moins ce n’est pas une vie simplement, mais une vie mortelle qu’on doit l’appeler. Lorsque nous voyons qu’un homme est sur le point de mourir, nous disons avec raison : Cet homme se meurt. Ne faisons-nous autre chose dès que nous commençons de vivre, que de nous approcher à chaque moment de la mort, et de mourir ? Les jours de cette vie sont courts et mauvais, dit le Patriarche (Gen. XLVII).» On ne vit véritablement que lorsqu’on a une vie vivante et vitale. Les jours dont on jouit ne sont heureux que lorsqu’on est assuré que leur durée est sans fin. Rendons grâces de tout notre cœur à celui dont la puissance et la bonté ont disposé toutes choses : les jours où nous n’avons que des peines à souffrir doivent finir en fort peu de temps ; au lieu que les jours où nous ne devons trouver que du repos et de la félicité, doivent durer éternellement.
2. « Je le comblerai de jours et d’années. » Le Seigneur explique dans ce verset la promesse qu’il a faite dans le précédent en disant: « Je le glorifierai. » Qui est-ce qui ne se contentera pas d’être glorifié, par celui dont les œuvres sont parfaites ? Celui dont la grandeur est sans limites, peut-il glorifier autrement que sans limites. La gloire qui procède de la gloire immense de Dieu a quelque chose de la grandeur et de l’immensité de son principe. Aussi est-ce avec raison que saint-Pierre dit que « la glorification de Notre-Seigneur sur le Thabor procédait d’une gloire magnifique. (II Petr. I, 17). » Elle est magnifique, en effet, et se communique à nous d’une manière magnifique, avec une durée éternelle, une variété infinie, et une plénitude sans mesure. La gloire de cette vie est trompeuse. Son éclat est vain, et les jours de l’homme sur la terre n’ont qu’une durée extrêmement courte ; aussi cette vie ne sera-t-elle jamais l’objet des désirs du sage, qui dira toujours du fond de son cœur à celui qui en sonde les replis «Seigneur, vous savez que je n’ai jamais désiré les jours de l’homme (Jérem. XVIII, 16). » C’est peu, non-seulement je ne désire pas ce que l’homme désire, mais je ne veux même point le recevoir, car je sais qui est celui qui a dit : « Je ne reçois point ma gloire des hommes (Joan. V,. 41). » Combien donc sommes-nous misérables de chercher la gloire que les hommes se donnent les uns aux autres, et de ne point chercher celle qui ne vient que de Dieu ? Car il n’y a que celle-ci qui soit longue et abondante. Les jours de l’homme sont courts ; et ces jours fleuriront et passeront ainsi que la fleur des champs, comme dit l’Ecriture : « La tige s’est séchée, et la fleur qu’elle soutenait s’est aussi fanée mais la parole du Seigneur demeure éternellement (Isa. XI., 7). » C’est le vrai jour que celui qui ne doit point finir. C’est dans ce jour seulement que se rencontre l’éternelle vérité, l’éternité véritable, l’éternité éternelle, qui seule est vraiment capable de remplir tous nos désirs. Comment, en effet, la gloire qui est trompeuse et vaine pourrait-elle y réussir ? Elle est si complètement vide que nous sommes obligés de reconnaître qu’elle nous met dans l’indigence et nous vide, plutôt qu’elle ne nous remplit. Aussi en attendant, mieux vaut pour nous être abaissés que d’être élevés, d’être dans la peine plutôt que dans les plaisirs, puisque peines et plaisirs doivent bientôt passer, avec cette différence pourtant, que les unes ne doivent nous produire que des supplices, et les autres que des couronnes.
3. Certainement l’affliction est bonne puisque c’est par elle que Dieu nous conduit à la gloire, selon ces paroles : « Je suis avec lui dans l’affliction : je le délivrerai et le remplirai de gloire. » Rendons grâces au Père des miséricordes, qui est avec nous dans l’affliction, et nous console dans toutes les peines, qui nous arrivent. Car il nous est nécessaire, comme j’ai dit, d’être dans les souffrances qui se changent en gloire, et dans la tristesse qui se change en joie, mais en une joie qui ne doit jamais finir, et ne peut jamais nous être ravie par qui que ce soit, en une joie, dis-je, abondante, pleine et parfaite. Il est bon d’être dans la peine, puisque c’est par elle que nous devons accueillir la couronne de la gloire. Ne méprisons pas les souffrances, mes frères, c’est une semence bien modeste, mais il doit en sortir beaucoup de fruit. C’est une semence peut-être peu agréable au goût, à cause de son amertume, c’est peut-être le grain de sénevé, mais ne considérons pas le dehors et l’apparence, voyons en les vertus cachées. Souvenons-nous que les choses qui se voient sont temporelles, et que celles qu’on ne voit point sont éternelles. (II Cor. IV, 18.) Goûtons, dans ces maux, que nous avons à souffrir, les prémices de la gloire qui s’y trouvent comme en germe. Faisons consister notre gloire clans l’espérance de participer à la gloire de notre grand Dieu : ce n’est pas encore assez, mettons-la dans toutes les afflictions de cette vie, puisqu’elles sont pour nous une raison d’espérer que Dieu nous donnera de glorieuses couronnes. Peut-être est-ce ce que l’Apôtre a voulu nous apprendre, lorsqu’après avoir dit : « Nous mettons notre gloire dans les afflictions : il ajoute aussitôt : Parce que l’affliction produit la patience , et que la patience est une épreuve qui produit l’espérance (Rom. V, 14). ». Il est manifeste par ces paroles, que l’Apôtre, après avoir dit que nous devons mettre notre gloire dans l’espérance, a ajouté que « nous devons aussi mettre notre gloire dans les afflictions, » non pour dire quelque chose de différent, mais pour s’expliquer davantage, et nous faire mieux entrer dans sa pensée. Car il ne propose qu’une même gloire dans ces deux expressions, et il joint seulement les afflictions à l’espérance, pour montrer sur quoi l’espérance de la gloire doit être fondée. C’est, en effet, dans l’affliction qu’on doit trouver l’espérance de la gloire ; que dis-je ? c’est dans l’affliction même que la gloire se trouve. Et de même que l’espérance du fruit est dans la semence, le fruit de même y est aussi contenu. C’est en ce sens qu’il est dit que dès maintenant le royaume de Dieu est en nous , que nous possédons un trésor d’un prix inestimable dans des vaisseaux de terre, dans un champ de très-petite valeur. C’est qu’en effet ce royaume et ce trésor sont véritablement en nous, mais ils y sont cachés. Heureux celui qui les trouve ! Or, quel est celui-là ? Sinon celui qui considère plutôt la récolte que la semence ? L’œil de la foi trouve ce trésor parce qu’il ne juge pas des choses selon les apparences, mais qu’il voit les choses qui ne peuvent paraître à nos sens, et regarde ce qui ne saurait se voir des yeux du corps, comme il est évident que l’Apôtre avait trouvé ce trésor puisqu’il souhaitait de le faire trouver à tous les autres, quand il disait : « Les peines si courtes et si légères que nous souffrons maintenant, produisent en nous le poids d’une gloire éternelle qui surpasse toute mesure (II Cor. IV, 17) » Il ne dit pas : Les afflictions seront couronnées, mais il dit : elles produisent en nous, dès maintenant, le poids d’une gloire éternelle. Cette gloire, mes frères, ne parait point. Elle est cachée en nous dans l’affliction, et ce qu’elle a d’éternel est dérobé à nos yeux par ce voile d’un moment ; ce poids, cette valeur sans mesure, est contenue dans une chose de peu d’importance, et de mince valeur. Aussi hâtons-nous, pendant que nous sommes sur la terre, d’acheter ce champ, et le trésor qui y est caché. Estimons-nous bienheureux lorsque nous sommes dans les afflictions, et disons du fond du cœur : « Il vaut mieux aller dans une maison de deuil qu’en une maison de festin (Eccli. VIII, 3). »
4. « Je suis avec lui dans l’affliction, dit le Seigneur. » Je ne chercherai donc pas autre chose que l’affliction. Il m’est bon de m’attacher à Dieu : et de m’y attacher de telle sorte, que je mette en lui toute mon espérance puisqu’il a dit : « Je le délivrerai de ses peines et le glorifierai (Psal. LXXII, 28). » Je suis avec lui dans l’affliction, et mes délices sont d’être avec les enfants des hommes (Cor. VIII, 31). » Voilà bien l’Emmanuel, le Dieu avec nous. « Je vous salue, pleine de grâce, dit l’Ange à Marie : le Seigneur est avec vous (Luc. I , 28). » Il est avec nous dans la plénitude de la grâce, et nous serons avec lui dans la plénitude de la gloire. Il est descendu sur la terre pour être près de ceux dont le cœur est affligé, et pour être avec nous dans les épreuves de cette vie. Mais viendra un temps, comme, dit l’Apôtre, où nous serons transportés par les nuées, pour aller au devant de Jésus-Christ ; et alors nous serons pour toujours avec Notre Seigneur, si toutefois nous travaillons à l’avoir toujours avec nous, afin que celui qui doit nous établir dans notre éternelle patrie, soit notre compagnon, ou plutôt, que celui qui doit être lui-même notre patrie, soit aussi lui-même notre voie. Seigneur, il m’est donc beaucoup plus avantageux de souffrir, pourvu que vous soyez toujours avec moi, que de régner sans vous, que d’être dans les plus grandes réjouissances sans vous, que de jouir même de la gloire, séparé de vous. Oui, Seigneur, il est bien meilleur pour moi de vous embrasser dans l’affliction; de vous avoir présent dans le creuset de l’épreuve, que d’être sans vous dans le ciel. Car qu’est-ce que je souhaite dans le ciel, et que désiré-je de vous, sur la terre, sinon vous-même ? Si la fournaise éprouve l’or, la tentation éprouve les justes. C’est dans ces rencontres, oui c’est là, Seigneur, que vous êtes avec eux (Eccli. XXVII, 6), que vous demeurez au milieu d’eux, c’est lorsqu’ils sont assemblés en votre nom, comme vous avez autrefois daigné assister les trois enfants qui furent jetés dans la fournaise de Babylone, d’une présence si visible, que vous contraignîtes un roi infidèle de s’écrier, « qu’il voyait dans les flammes une quatrième personne qui était semblable à un fils de Dieu (Dan. III, 92). » Pourquoi tremblons-nous : pourquoi nous arrêtons-nous pourquoi fuyons-nous à la vue de la fournaise des afflictions? Il est vrai que le feu redouble son ardeur; mais le Seigneur est avec nous dans nos souffrances, et, si Dieu est avec, nous, qui sera contre nous ? Si, Dieu nous arrache des mains de nos ennemis, qui est-ce qui pourra nous ravir de ses mains toutes puissantes ! Qui est-ce qui peut nous arracher d’entre ses mains ? Enfin, si c’est lui qui nous glorifie, qui est-ce qui pourra nous jeter dans l’ignominie ? S’il nous établit dans la gloire, qui pourra nous humilier ?
5. Mais écoutez quelle gloire Dieu doit nous donner. «Je le comblerai, dit-il, de jours et d’années. » Et d’abord s’il parle de jours au pluriel, c’est pour nous marquer non pas une vicissitude, mais un grand nombre de jours. Il ne faut pas se figurer l’éternité comme une succession de jours, c’est ce qui fait dire au Prophète : un seul jour dans vos tabernacles, Seigneur, vaut mieux que mille autres jours (Psal. LXXXIII, 11). Nous lisons que des saints et des hommes parfaits sont sortis de cette vie pleins de jours, c’est-à-dire, je pense, remplis de vertus, et de grâces, car les saints reçoivent de jour en jour, non de leur propre esprit, mais de l’esprit de Dieu même cet accroissement et cette plénitude de vertu et de grâces qui les transforme, et qui les rend semblables à lui, et les fait monter de clarté en clarté. Si donc la grâce est appelée un jour et une lumière, si même l’éclat qui vient de l’homme, et si cette gloire sans fondement et sans solidité que nous cherchons à recevoir les uns des autres, est, comme j’ai dit ailleurs, le jour de l’homme, combien la plénitude de la véritable gloire mérite-t-elle plutôt d’être appelée un vrai jour et un plein midi ? Et si nous pouvons regarder comme plusieurs jours de la vie de l’âme, les diverses grâces qu’elle reçoit, comment ne pourrions-nous pas aussi regarder, comme un grand nombre de jours la gloire dans laquelle il jouit de tant de biens ? Mais écoutez comment le Prophète a voulu parler d’un grand nombre de jours sans vicissitude, par ces paroles, il dit en effet : «La lumière de la lune sera comme la lumière du soleil : et la lumière du soleil sera elle-même comme la lumière de sept jours (Is. XXX, 16).» Je pense que c’était pendant les jours de cette éternelle vie, que le Roi fidèle souhaitait de chanter ses cantiques dans la maison du Seigneur. Car ce sera comme un chant de cantiques à la louange de Dieu que d’être pleins de reconnaissance pour le bonheur de posséder une gloire si abondante, et que d’être toujours occupés à rendre des actions de grâces à sa divine Majesté.
6. « Je le remplirai d’une longueur de jours. » C’est comme s’il disait : je sais ce qu’il désire : je sais ce dont il a soif, et ce qu’il goûte le plus, ce n’est ni l’or, ni l’argent, ni la volupté, ni la curiosité ni aucune dignité du siècle. Il méprise tout cela et n’en fait pas plus de cas que du plus vil fumier. Il a vidé son cœur de toutes ces choses, et il ne peut souffrir qu’aucune d’elle l’occupe, parce qu’il sait qu’aucune ne saurait le remplir. Il n’ignore pas à l’image de qui il a été fait, et de quelle grandeur il est capable ; et il ne veut point s’accroître un peu d’un côté pour diminuer beaucoup de l’autre. C’est pourquoi « je comblerai de jours celui qui ne saurait être satisfait et rempli que par la véritable et l’éternelle lumière. Et la longueur de ces jours sera sans fin, l’éclat de leur lumière sans défaillance, et l’abondance, dont je le remplirai, n’engendrera jamais pour lui aucun dégoût. Car son bonheur sera parfaitement assuré, sa gloire puisera sa source dans la possession de la vérité, et l’abondance sera toujours pour lui une source de joie et de délices. « Je lui ferai part du salut que je destine à mes saints. » Cela signifie que le fidèle méritera de voir ce qu’il a désiré, lorsque le roi de gloire rendra l’Eglise, son épouse, toute glorieuse et la montrera sans tache, sans rides et sans défauts, à cause de la splendeur permanente du jour dans lequel elle sera établie. Les âmes qui ne sont pas entièrement pures, ni les âmes qui sont dans quelque sorte d’agitation et de trouble, ne sont point encore capables de recevoir cette lumière de gloire que Jésus-Christ prépare aux élus. C’est pourquoi Notre-Seigneur nous commande par son Apôtre, ainsi que je l’ai dit, de nous établir dans la sainteté et dans la paix (Heb. XII, 14), parce que sans ces deux choses personne ne pourra voir Dieu. Quand donc il aura rempli vos désirs par les biens dont il vous donnera la possession, en sorte que vous n’aurez plus rien à désirer, votre espri, devenant tout à fait tranquille par cette plénitude même, vous pourrez alors contempler la sérénité et la majesté de Dieu ; et vous lui serez semblable parce que vous le verrez comme il est. Peut-être bien aussi, peut-on dire que les saints, ayant en eux-mêmes toute la plénitude de la gloire qui leur sera propre, du sein des délices éternelles, considéreront de tous côtés les choses que Dieu a faites pour le salut et la félicité des hommes, et verront reluire sa Majesté sur toute la terre. On pourrait rapporter à cela ces paroles «Je lui montrerai le salut que je destine à mes saints. »
7. Nous pouvons encore entendre ce verset, de la jouissance de ces jours où Dieu promet qu’il montrera le salut aux saints : « Je le remplirai, dit-il, d’une longueur de jours. « Et comme pour répondre à cette objection, d’où viendra cette longueur de jours dans la céleste cité, où le soleil n’aura pas à luire pour faire le jour, puisqu’il n’y aura pas de nuit, il ajoute : «je lui montrerai le salut que je destine à mes saints : » ce salut n’étant autre chose que le Sauveur dont la splendeur éclairera toujours les saints, selon cette parole de l’Écriture : « l’Agneau est la lumière (Apoc. XXI, 23). » « Je lui montrerai l’auteur du salut, » c’est-à-dire : je ne l’instruirai plus par la foi ; je ne l’exercerai plus par l’espérance ; mais je le remplirai par la contemplation même du Sauveur, je le lui montrerai : » je lui montrerai Jésus-Christ, afin qu’il contemple éternellement ce Rédempteur en qui il a cru, qu’il a aimé, qu’il a toujours désiré. Seigneur, montrez-nous votre miséricorde (Psal. LXXXIV, 8), et donnez-nous ce Sauveur, qui ne peut venir que de vous, et cela nous suffit ; car celui qui le voit, vous voit aussi, parce qu’il est en vous, et que vous êtes en lui. Or, toute la vie éternelle, consiste à vous connaître, parce que vous êtes le vrai Dieu, et à connaître Jésus-Christ que vous nous avez envoyé (Joan. XVII, 3). Et alors vous laisserez aller votre serviteur en paix, selon votre parole, parce que mes yeux verront le Sauveur que vous avez donné au monde, votre Jésus Notre Seigneur qui est Dieu et béni par dessus tout, dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.
Texte intégral – Saint Bernard – Dix-sept sermons sur le psaume 90
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