Septembre – Vendanges

Mois de Septembre

« Le vin de la joie »

Ecoutons Guillaume de Saint Thierry – Commentaire sur le Cantique (extraits)

Vigne-450La Charité est la cave au vin, et le vin de cette cave, c’est la joie de l’Esprit-Saint. Aussi dans cette cave au vin n’y a-t-il rien d’autre que du vin. Tout ce qui entre là, tout ce qu’on y apporte, devient du vin. Car le feu de l’amour attire tout à soi, le dévore, et comme le feu matériel, le convertit en sa propre substance, puisque pour celui qui aime Dieu, tout concourt à son bien.

Pourtant la joie du Seigneur a un cachet de gravité, son style sérieux est le fait de ceux qui se réjouissent et exultent, non seulement à la nouvelle que leurs noms sont inscrits dans les cieux et que leur récompense est grande, mais aussi quand ils tombent dans des épreuves variées, lorsqu’à cause du Dieu qu’ils aiment, le monde les hait, les hommes les rejettent.

La joie qui vient du dehors a tôt fait de tomber, mais l’âme sainte qui ne puise pas sa joie dans une cause étrangère, est toujours joyeuse, car elle a en elle de quoi se réjouir. Cette joie-là ne consiste pas dans le rire de la bouche, mais dans la jubilation du cœur. Celui qui se réjouit ainsi a toujours le cœur léger et tranquille, du fait de sa bonne conscience, malgré tout ce qui peut lui arriver ou fondre sur lui. Il est au-dessus de tout ce qui lui survient, car il est élevé en Dieu. La joie en un mot, est la savoureuse jouissance de l’objet aimé.

Pour cette raison, la mesure et la qualité de la joie vont de pair avec la mesure et la qualité de l’amour. Un amour plus solide engendre ordinairement une joie plus solide. Ainsi l’amour de Dieu a sa joie propre : la joie de l’Esprit-Saint que nul n’enlève à celui qui aime, parce qu’elle est sienne, parce qu’elle est la possession assurée de sa conscience. C’est le vin du cellier, ce vin dont était enivré celui qui disait : “Qui nous séparera de l’amour de Dieu ? Tribulation, angoisses, persécution, faim, nudité, péril, glaive ? ” Et dont le prophète disait : “Mon calice enivrant, comme il est magnifique ! ”.

Oui, voilà le vin exhalant déjà la vertu du vin nouveau que Jésus boit avec ses disciples dans le Royaume de son Père. Voilà le vin qui crée les vierges, dit un prophète ; le vin de la componction qui met en liesse le cœur de l’homme, ajoute le psalmiste. Au vrai, componction du désir et allégresse de la possession savoureuse ne se contrarient qu’à première vue dans une âme. Jaillies d’une unique source d’amour, l‘une et l’autre appartiennent à la cave au vin.

Guillaume de Saint Thierry – Commentaire sur le Cantique 117-119 (extraits)